La concentration, pas si facile d’être toujours au top ! En fait, nous avons souvent le sentiment de fonctionner en mode réactif . Etre interrompu par un email, une alerte, enchaîner sur autre chose et avoir totalement perdu le fil de ce qui nous occupait préalablement. Il nous arrive aussi d’être absents au moment présent, à la discussion à laquelle nous souhaitions participer. Ou alors, de ne rien retenir d’une réunion ou d’un podcast comme si nous n’avions pas vraiment été là. …Bref, nous nous sentons parfois déconnectés et dispersés. Depuis que nos vies se sont densifiées, nous sentons parfois que notre cerveau ne suit plus. Sommes-nous devenus incapables de focaliser mon attention ? Est-ce possible de réapprendre à se concentrer ?
La concentration c’est quoi ?
Les travaux de Jean Philippe Lachaux
Pour nous pencher sur la question de la concentration, faisons ensemble un détour par les neurosciences. Pas de panique, nous allons nous appuyer sur un excellent ouvrage de vulgarisation. Le cerveau funambule de Jean-Philippe Lachaux. L’auteur est directeur de recherches en neurosciences au sein de l’unité Inserm « Dynamique cérébrale et cognition » à Lyon. En fait, il nous apprend que notre cerveau fonctionne par cycles très rapides de couples perception-réaction.
Bien souvent des éléments détournent notre attention
Alors que nous sommes lancés dans une action décidée avec un objectif clair. Quelque chose se matérialise et détourne notre attention. En réalité, nous percevons un élément qui déclenche une réaction orientée vers un autre objet que celui qui nous occupait initialement. C’est un cycle perception-action. Par exemple, au petit-déjeuner, je versais du lait dans le verre de mon fils quand mon deuxième a bondi vers mon canapé blanc les doigts pleins de Nutella. J’ai été envahie par la trouille. J’ai réagi en l’appelant et en lui rappelant qu’il était bien trop sale pour s’installer sur ce meuble. Résultat, je me suis rappelée du lait que je versais lorsque j’en ai senti les premières gouttes sur mes pieds. Une fraction de seconde a suffi pour que je perde ma concentration sur ce que je faisais.
la concentration et le cycle de perception/action
La source est à trouver dans mon cerveau. Lorsqu’un stimuli survient, nous recevons l’information de façon visuelle. Cette stimulation est transmise vers le lobe frontal de notre cerveau. Le lobe frontal et les régions sensorielles vont discuter pour affiner notre perception. Par exemple, cette sensation sur mon pied. Elle est fraîche, liquide. Mon pied est mouillé. Ensuite, je fais appel à une deuxième zone sensorielle et je baisse les yeux pour confirmer ce dont le lobe frontal se doutait. C’est bien du liquide froid. Et maintenant je peux confirmer que c’est du lait. Une fois que le cerveau comprend bien à quoi il est confronté. Il évalue quelle est la bonne réponse à apporter à la situation au vu des informations qu’il a collecté.
Notre cerveau joue les arbitres
Il joue l’arbitre entre plusieurs actions et fait un choix. En fait, il transmet l’information au cortex moteur qui produit l’action. Dans le cas présent, mon cerveau n’a pas eu besoin de plus de précisions pour décider que mon bras devait relever la bouteille de lait et la reboucher. Pour que ensuite, je ne cherche du regard un linge pour tout essuyer. Vous comprenez bien avec cet exemple précis que ce cycle ne prend souvent qu’un quart ou une demi-seconde. Un cycle rapide produit forcément des erreurs. Dans mon exemple du lait renversé, mes multiples réseaux neuronaux se sont livrés une bataille sans merci pour déclencher mes actions. Au sein de ces cycles de perception/action ultra rapides, mon cerveau n’a pas fait le bon choix. Or, « Se laisser distraire c’est souvent choisir la mauvaise action » nous dit précisément Jean-Philippe Lachaux.
Les 3 critères qui influencent le choix de l’action dans un cycle perception-action.
Nos associations
D’abord, notre cerveau s’est habitué à certaines associations perception-action. Il va chercher un historique de nos actions passées les plus souvent associées à ce type de perception pour choisir l’action à faire. Par exemple, un enfant qui apprend à lire prononce d’abord des sons sans forcément comprendre. Puis il va ensuite les intérioriser et leur donner un sens. C’est pourquoi plus tard, il nous est difficile de ne pas lire quelque chose qui est écrit devant nos yeux. Ou alors nous comprenons des phrases alors qu’il manque des lettres
Une continuité
Ensuite, il existe une forme de continuité entre nos actions qui guide notre cerveau pour prendre des décisions. Je me saisis d’un verre d’eau car j’ai soif. Mon action suivante va donc automatiquement être orientée vers la boisson. L’endroit où elle est rangée puis les gestes d’ouvrir, verser, fermer et boire.
Le circuit de récompense
Enfin, le troisième critère qui guide de notre cerveau est plus émotionnel. C’est notre recherche permanente de plaisir ou notre stratégie d’évitement du déplaisir. C’est ce que les scientifiques appellent plus communément le « circuit de récompense ». Notre cerveau analyse à chaque instant la qualité de notre ressenti face à une expérience puis il développe ses propres associations. C’est comme si, au fur et à mesure de notre vie, notre cerveau avait enregistré les conséquences de certaines actions sur notre niveau de plaisir. De plus, il est capable de nous détourner de ce qui nous a déplu par le passé pour nous concentrer sur ce qui nous a procuré du plaisir ou de la joie.
Notre système neuronal nous joue des tours !
Par exemple, c’est ce système neuronal qui nous encourage à manger quand nous avons faim. Mais c’est aussi ce même système qui nous incite à scroller interminablement sur les réseaux sociaux sans but précis. Ou à nous affaler devant une série au lieu de vider la machine. Ne le sous-estimez pas, ce circuit de récompense est très puissant. Il est capable de détourner notre attention, de cycle en cycle, de nos objectifs intentionnels. Il est tellement avide de plaisir qu’il peut prendre le pas sur nos habitudes de vie plus saines. C’est notamment le cas chez les personnes qui développent des addictions.
Le cerveau collecte des perceptions et choisit des actions
L’équilibre attentionnel au service de la concentration
J’aimerais vous parler d’une étude édifiante menée par l’équipe de Jean-Philippe Lachaux. Elle teste le sens de l’équilibre attentionnel d’une certaine population. L’équilibre attentionnel, nous le présente le chercheur, est un peu comme la traversée d’une poutre. La poutre nous indique à la fois les actions à mener pour traverser. Avancer pas à pas pour atteindre l’autre extrémité et nous donne une direction précise, un objectif. Donc, nous comprenons bien combien l’exercice de la traversée d’une poutre est un exercice qui mobilise notre concentration. Car à la moindre inattention c est la chute.
Nous sommes doués pour être distraits !
Du coup, pour comprendre le fonctionnement de cet équilibre attentionnel, l’équipe de recherche a mis au point une expérience simple. Les participants doivent retenir une lettre montrée sur un écran. Puis indiquer sa présence ou non dans des lots de 4 lettres qui se présentent à l’écran toutes les 2 secondes. Le test durait 4 minutes. Les résultats démontrent que le temps de réaction de chaque participant varie fortement au cours de l’expérience. Et qu’il se trompe régulièrement, mettant en lumière les moments où l’individu s’est laissé distraire. Ne vous sentez donc pas coupables d’être parfois distraits. Car même sur un exercice très facile de 4 minutes, nous sommes extrêmement doués pour nous distraire nous-mêmes ! Notre équilibre attentionnel est naturellement vacillant !
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Les propositions d’action immédiate trouble la concentration
Vous est-il déjà arrivé d’être projeté ailleurs que dans le moment présent par vos soucis ou vos pensées ? Ou bien, vous assistez à une réunion ou à un dîner et d’un coup vous ne participez plus à la conversation ? Ou encore, vous vous perdez dans une pensée qui vous accapare ? Dans notre quotidien, ça nous arrive tout le temps. Comme, vous êtes en train de préparer un repas et vous pensez au sac de piscine, à la lunch box du lendemain, au formulaire qu’il fallait signer. Sans parler de penser au moment où vous allez pouvoir lancer la machine à laver au lieu d’écouter ce que vous raconte votre fils.
Notre cerveau garde en mémoire tous les projets en cours, sans les hiérarchiser. Il sait donc que vous n’avez pas décidé de comment vous vous rendrez à votre rendez vous de vaccination ou de votre menu du dîner. Et il va inlassablement vous envoyer des petits rappels aussi souvent que possible. Jean-Philippe Lachaux les appelle les « Propositions d’Actions Immédiates » – PAM.
Notre cerveau est comme un chercheur d’or
Pour nous expliquer ce phénomène, il utilise la métaphore du chercheur d’or. Le chercheur d’or est constamment traversé par un sérieux dilemme : continuer à chercher là où il est ou explorer une autre source. Notre cerveau fonctionne couramment de cette façon. Dois-je continuer à regarder cette série ou zapper sur une autre chaîne ? Dois-je encore améliorer ce dossier ou passer au suivant ?
Notre réseau de sentinelles est prêt à rompre la concentration
De plus, Comme notre cerveau est très organisé, il s’entoure d’un réseau de sentinelles qui surveillent ce qui se présente et ce qui pourrait représenter un intérêt supérieur à ce que nous faisons. C’est ce système pré-attentif qui, par exemple, m’indique qu’une araignée est en train de descendre sur le mur. Il m’envoie un signal que je confirme en me détournant de ce que je faisais pour identifier clairement l’araignée et confirmer le signal. Nous en voyons bien les bénéfices : ce système collecte tout danger et opportunité pour nous. Cependant, ce mode de veille permanent est une source majeure de distraction.
J’ai encore 5 slides à faire quand je reçois un pop up What app de ma soeur…
Par exemple, je veux vraiment finir cette présentation, il me reste 5 slides que j’ai bien en tête – intention claire, concrète et à court terme. Mais je reçois une alerte de notification Whatsapp : chic ma sœur me répond pour le cadeau d’anniversaire de Maman – perception. Et là je me rappelle que je dois en reparler avec mon conjoint, nous ne nous sommes pas encore mis d’accord sur le budget – système d’alerte. Je file sur internet grâce au lien que ma sœur m’a envoyé – action. Une pub surgit, je pense à une autre idée ! Je dois racheter les goodies pour l abonnement de couple 1 temps pour 2. Bref, j’ai perdu beaucoup de temps. Et quand je reviens à ma présentation, il m est devenu bien difficile de me rappeler ce que je voulais mettre dans ces fameuses slides…J’ai reçu une première PAM proposition d actions immédiates qui en a déclenché une série d’autres qui m’ont totalement fait perdre le fil de ce sur quoi j’étais concentrée.
Comment maitriser notre équilibre attentionnel au service de la concentration
Mais pas d’inquiétude, la maitrise de l’équilibre attentionnel est à la portée de tous. Elle nécessite que vous gardiez en tête ce que vous cherchez à faire et où placer votre attention pour y arriver, autrement dit : sur quelle poutre avancez-vous et comment y rester en équilibre. Dans mon exemple, j’aurai été plus efficace à rester sur la poutre de ma présentation et rejeter ces PAM qui m’ont fait tomber ! C’est de cette manière que vous garderez le contrôle de vos perceptions et que vous éduquerez votre cerveau à choisir les bonnes actions.
Programmer notre cerveau pour faciliter la concentration
Nous pouvons programmer notre cerveau grâce à des objectifs Claires, Concrètes et à Court terme. Notre mémoire stocke ces objectifs et les utilise comme filtre pour que notre système neuronal choisisse la bonne action au bon moment. C’est aussi grâce à ces objectifs bien définis que nous pourrons rejeter les PAM ou les stocker pour plus tard et éviter que ces satanés propositions d actions immédiates ne captivent notre attention. Par exemple, tandis que j’écris ce podcast, je me rappelle que je dois répondre à un email. Puis j’entends mon mari qui regarde une série que j’adore et mon système de récompense me titille. Mais mon objectif est clair : finir ce podcast – mon objectif est concret : 15000 signes organisés selon un plan bien précis déjà couché sur le papier – mon objectif est à court terme : à la fin de la soirée.
Quels sont les bénéfices de la concentration ?
Un sentiment de compétence
Rester concentré sur une action ou un objet améliore notre sentiment de contrôle et de compétence. Nous vous en avions parlé dans notre Bulle de bonheur #91 J’expérimente le flux. Lorsque nous sommes à 100% à ce que nous faisons, nous sentons que nous maîtrisons ce que nous accomplissons. Quel que soit le résultat, nous en retirons la sensation d’avoir mis tous nos moyens au service de notre projet et cela améliore notre estime de nous-mêmes.
Passer en mode actif
Cette sensation de contrôle est aussi alimentée par votre capacité à trier vos pensées. Lorsque vous êtes assaillis de PAM et que vous réussissez à reprendre le contrôle, vous passez du mode passif au mode actif. Rappelez vous vous êtes acteur de votre vie podcast # 55 Vous passez de l’habitude mécanique à la conduite intentionnelle. Vous reprenez les commandes.
Diminuer notre niveau de fatigue
Par ailleurs, se concentrer diminue notre niveau de fatigue. Les personnes concentrées sont souvent présentées en effort, sourcils froncés, regard absorbé,…pourtant, ce n’est pas le fait de se concentrer qui nous fatigue. Ce qui nous épuise c’est l’éparpillement, le multi-tasking, le fait de mener plusieurs objectifs de front. Nous sommes dans la recherche d’optimisation à tout prix de nos ressources et cette mécanique est épuisante pour le cerveau. Ce qui nous demande le plus d effort est de faire taire ces alertes que le cerveau nous renvoie. Nous avons al capacité de choisir nos pensées podcast Lorsque nous y arrivons, nous ressentons un profond apaisement intérieur qui renforce notre niveau d’énergie.
Se connecter à l’ici et maintenant
Enfin, retrouver un niveau normal de concentration est une forme d’écologie. Lorsque nous faisons taire les multiples sollicitations extérieures, nous nous reconnectons au ici et au maintenant. Nous vous en avions parlé dans notre Bulle de bonheur #25 Je découvre le pouvoir du moment présent. Nous sommes plus attentifs au monde qui nous entoure, à la conversation à laquelle nous participons, à nos proches, aux paysages, aux odeurs,…Lorsque nous allégeons nos cerveaux de cette tempête du zapping permanent, nous améliorons notre expérience sensorielle Je laisse parler mes sens podcast #46 je laisse parler mes sens, nous nous sentons connectés à l’environnement qui nous entoure et à nous-mêmes. C’est une grande source de joie, de gratitude et de détente. Si vous souhaitez vous pencher sur ces questions, je vous encourage à aller réécouter notre épisode #11 Je dis 3 mercis par jour ou le #20 j adopte la gratitude
En bref
– Notre cerveau fonctionne par cycles rapides perception
– Notre concentration se heurte à l’invasion des PAM, les propositions d’actions immédiates
– A tout moment, nous pouvons reprogrammer notre équilibre attentionnel
– La concentration améliore notre estime de nous-mêmes, notre connexion au monde et diminue notre fatigue
Allez hop je me lance
A vous de jouer chers auditeurs, piochez une carte 2 minutes ensemble ! : cette semaine, portez votre attention sur les sources de distraction qui vous entourent et notez toutes les propositions d’actions immédiates et les alertes qui sont venus vous déconcentrer. C’est une belle manière de les évacuer que nous détaillerons dans la deuxième partie de ce podcast. En fin de semaine, faites le bilan !