Comment fonctionne mon cerveau ? Je veux toujours plus d’argent, de reconnaissance, c’est un moteur dans ma vie professionnelle. Et pourtant, je cours après cette promotion sans être vraiment sûre que c’est ce que je veux. J’ai réalisé en me lançant dans un grand tri combien j’avais accumulé de vêtements au cours des années. J’avais honte et en même temps, pendant les soldes, c’est plus fort que moi. J’ai encore racheté – pour les enfants certes, mais quand même. En avions-nous vraiment besoin ?
Cela va avec l’impression grandissante que je fais tout ça de plus en plus vite presque sans y réfléchir. Et là ça me chicotte : qu’est ce qui me pousse à agir ? Pourquoi mes comportements sont-ils devenus si compulsifs ? Puis-je faire quelque chose pour me tempérer ?
Constats
Source d’inspiration
Pour cet épisode plus scientifique, nous nous sommes beaucoup inspirés de l’essai Le bug humain de Sébastien Bohler. Sébastien Bohler est docteur en neurosciences et rédacteur en chef du magazine Cerveau et Psycho. Il est spécialisé en neurosciences et psychologie.
Dans cet essai de vulgarisation scientifique, il démontre les impacts néfastes des mécanismes archaïques de notre cerveau sur la destruction progressive et pourtant annoncée de l’environnement. Nous allons nous appuyer sur lui pour décrire ces mécanismes archaïques et vous aider à mieux comprendre votre cerveau.
Je change de regard
Notre cerveau est programmé
Depuis les premiers hommes, notre cerveau est programmé pour chercher à atteindre 5 objectifs primaires : manger, se reproduire, acquérir du pouvoir, produire le minimum d’effort possible et collecter un maximum d’informations sur son environnement. Ce sont essentiellement des réflexes de survie.
Le cerveau et son fonctionnement
D’où cela vient-il ? D’une structure présente dans notre cerveau qui s’appelle le striatum. C’est une partie inférieure du cerveau, située sous le cortex. En résumé, elle régule notre motivation et nos impulsions.
C’est une des parties les plus importantes de notre cerveau pour ce qui est de notre prise de décision.
Le striatum existe chez beaucoup d’animaux : poissons, reptiles, amphibiens et mammifères. Au fur et à mesure des siècles, il s’est renforcé.
Expérience
Je vous partage une expérience concrète menée sur une espèce de poisson pour vous décrire la chimie qui entoure le striatum.
Lorsque le poisson cherche de la nourriture, tous ses mouvements sont dirigés par un réseau nerveux contrôlé par le striatum. Celui-ci libère de la dopamine si la recherche de nourriture du poisson porte ses fruits. Le poisson ressent donc un intense sentiment de plaisir et son cerveau enregistre que le circuit qui a permis d’obtenir de la nourriture à bien fonctionné. Cela qui renforce ce circuit de commande.
Autrement dit, le striatum récompense les bons gestes, envoie des shots de plaisir au sujet et renforce les circuits qui marchent. C’est une forme d’apprentissage comme à l’école. Quand je récite correctement ma poésie, je reçois une image ou un autocollant et j’ai d’autant plus envie de bien apprendre la prochaine. Jusque-là, pas de problème.
Rôle du striatum dans le cerveau
Le striatum est indispensable car il crée des incitations c’est-à-dire des signaux qui nous poussent à déclencher une action.
Heureusement qu’il est là d’ailleurs car les recherches menées sur des souris ont montré que si le circuit de dopamine du striatum est désactivé, les sujets se laissent mourir en quelques semaines.
C’est aussi ce que les médecins observent chez les patients dont le striatum a été endommagé : ils ont perdu leur capacité d’auto-activation psychique.
Cependant, le striatum est connecté au cortex et innerve presque toutes les instances de raison, de planification, d’organisation et d’abstraction de notre cerveau. Le circuit de récompense les influence tous.
Vous sentez probablement où je veux en venir. Le striatum est donc en partie responsable de nos comportements plus irrationnels comme par exemple le fait de manger sans faim.
Vous voyez la main dans le bol de cacahuètes.
Sensation de plaisir
Le système de récompense activé libère des sensations de plaisir telles qu’elles prennent le pas sur la sensation de satiété. C’est donc encore le striatum qui nous pousse à aller descendre une tablette de chocolat pour prendre une grosse dose de plaisir.
Le système de récompense est plus puissant que nos capacités de raisonnement rationnelles.
Or le striatum est un monstre glouton, il prend tout ce qu’il peut avoir. Une fois que le cerveau identifie qu’un comportement apporte une récompense, il le renforce et utilise le niveau de récompense comme la nouvelle référence.
Le cerveau va donc maintenant chercher encore plus de la récompense – c’est l’effet toujours plus. Il produit le même type d’effet qu’une dose de cocaïne ! Et d’ailleurs, les drogues reproduisent artificiellement le même schéma de plaisir. Le striatum est donc responsable de notre absence de modération dans de multiples domaines, les plus facilement observables étant l’alimentation et le sexe.
Deuxième enseignement de l’étude du striatum du cerveau
La recherche du pouvoir
Vous vous rappelez qu’au début de ce podcast, je vous parlais des 5 objectifs primaires dont la recherche de pouvoir. Notre cerveau est naturellement sensible à la hiérarchie et est programmé pour la comparaison sociale. Cela nous vient notamment de nos ancêtres les primates dont les leaders avaient accès à plus de nourriture ou encore aux meilleurs femelles.
L’étude du striatum montre que deux résultats provoquent une décharge positive. Lorsque nous gagnons contre un adversaire et lorsque nous voyons quelqu’un gagner. Car le gagnant pourrait représenter un partenaire auquel s’allier pour survivre.
Cependant, les études sur les jeux vidéos révèlent que le fait de gagner contre un logiciel n’active pas le striatum.
Ceci met en lumière un enseignement très important : Ce qui compte ce n’est pas de gagner, c’est de s’élever dans la hiérarchie.
Notre rapport à la hiérarchie
Concrètement, lorsque nous nous élevons dans la hiérarchie par l’achat d’une plus belle voiture que celle du voisin par exemple, nos gènes produisent des protéines qui dopent les effets de la dopamine et renforcent nos récepteurs de cette hormone. C’est ce que les psychologues ont appelé la comparaison sociale.
D’ailleurs, si nous réfléchissons bien, combien d’entre nous comparent leurs salaires, leur maison, les lieux de vacances avec leurs collègues et amis ? Nous sommes nombreux à apprécier notre niveau d’augmentation annuelle à l’aune de celles d’un échantillon comparable. Et ainsi ressentir une satisfaction seulement si notre augmentation est au moins égale à celle de nos pairs. L’absolu ne compte pas, seul le relatif nous permet d’apprécier notre résultat.
Encore ici un écueil : nous sommes guidés par une force profonde qui nous pousse à vouloir plus que ce que les autres ont. Même lorsque nous n’en avons pas besoin. Notre cerveau est programmé pour tenter de dominer les autres.
Troisième enseignement
Nos organismes ont enregistré depuis toujours que minimiser nos dépenses d’énergie pour nous nourrir augmente considérablement nos chances de survie.
Autrement dit, notre cerveau est donc aujourd’hui programmé pour en faire le moins possible.
Entre deux actions atteignant le même objectif, il nous poussera toujours à choisir l’option qui exige le plus petit effort.
Ce qui veut dire que nous sommes tous muni d’un formidable calculateur qui évalue toujours le rapport résultat obtenu versus effort fourni. Formidable richesse de notre bagage génétique. Cependant, ici encore, une petite nuance. Ce super calculateur est autonome et n’attend pas que vous lui commandiez de faire ce calcul. Ce qui veut dire qu’alors que vous êtes lancé dans une activité, il évalue en permanence si le jeu en vaut la chandelle. Il reste en alerte de toutes les autres activités que vous pourriez faire à la place pour moins d’effort et plus de plaisir.
C’est lui par exemple qui m’incite à mettre en pause la rédaction de cet épisode complexe pour aller scroller sur les réseaux sociaux, envoyer un texto à une amie ou regarder le pop-up arrivé sur mon téléphone.
Ce biais très fort nous pousse parfois à abandonner certaines activités au long cours parce que notre cerveau nous fait croire que nous aurions mieux à faire. C’est un point que nous avions abordé dans notre épisode 97 Je me concentre. Nous sommes donc programmés pour nous ménager et développer des technologies qui remplacent nos efforts.
Dernier enseignement de l’étude du striatum
Notre cerveau est naturellement attentif aux signaux. Ceux indiquant une source de nourriture, la possibilité de se reproduire ou d’élever notre statut ou encore n’importe quelle source de profit.
Il cartographie en permanence notre environnement avec ce prisme comme une tête chercheuse à l’affut d’information. Ce qui est intéressant c’est que le striatum libère de la dopamine à la fois lorsque la récompense arrive mais aussi lorsque nous captons un signal que la récompense arrive.
Autrement dit, je ressens du plaisir à l’idée de pouvoir bientôt m’acheter le prochain Iphone car j’anticipe le plaisir que je vais avoir à l’utiliser et le statut social qu’il va m’apporter. Mais aussi lorsque je le tiendrai en main pour la première fois.
Pas de limite pour le striatum
Cependant, comme nous l’avons pas mal répété au cours de cet épisode, notre striatum ne connait pas de limite. Dans le millénaire de la surinformation où nous sommes tous munis de mini-ordinateurs dans la poche de nos jeans, notre cerveau continue de chercher le maximum d’informations.
Nous sommes programmés pour être en alerte permanente. Cela créé des comportements excessifs comparables à la boulimie alimentaire. Nous avons besoin de collecter tout le temps de l’information avec comme unique but de ne rien manquer.
Le FOMO
C’est le phénomène de FOMO Fear Of Missing Out. C’est la peur de manquer une information importante ou un événement qui nous permette de nourrir nos relations ou de rencontrer de nouvelles personnes.
Le FOMO est le mauvais carburant du sentiment d’anxiété sociale qui nous laisse tout le temps sur le qui-vive et nous rend complètement accros aux sources d’information.
Après ce tour d’horizon, nous comprenons que le striatum est un élément indispensable à notre survie. Il est un très bon compagnon de route lorsque nous en comprenons le fonctionnement et que nous tempérons ses instincts.
Comment enrayer les mécanismes primaires du striatum de notre cerveau ?
Voici plusieurs pistes pour enrayer ou au moins un peu freiner notre tendance naturelle à la démesure.
- Prendre notre striatum à son propre piège et reformater nos conditionnements. Notre culture, la société dans laquelle nous évoluons développent leurs propres systèmes de récompenses.
L’approbation sociale
- Certains comportements remportent une forme d’approbation sociale. Par exemple, la générosité. Évidemment, il y a tellement d’autres bienfaits à la générosité dont nous vous avons parlé dans notre Bulle de Bonheur 105 je comprends les bienfaits de la générosité.
- Cependant, difficile de nier qu’une personne altruiste est souvent valorisée socialement ou respectée. Si nous nous mettons tous à générer des récompenses pour d’autres comportements, nous pourrons collectivement reprendre une partie du contrôle sur nos réflexes primaires. Cela s’applique par exemple aux comportements écologiques. Par exemple, l’auteur cite l’exemple de la Chine où le fait d’avoir un véhicule non polluant est devenu le summum de l’ascension sociale. Résultat : les ventes décollent et la liste d’attente pour obtenir des plaques d’immatriculation vertes identifiant ce type de véhicules s’allonge. Dès lors que l’objet de convoitise du striatum apporte plus de mesure et de modération, nous avons déjà remporté une sacrée bataille.
Le cerveau, avide d’informations
- Parmi d’autres choses, le striatum est avide d’informations, il est curieux. Nourrir sainement notre curiosité, apprendre, améliorer notre connaissance de sujets qui nous passionnent… Ce sont sont autant de pistes pour apporter un peu d’équilibre dans la chimie de notre cerveau et dans nos comportements. #17 je reste curieux
Autre constat :
- Les possibilités d’assouvir sans fin nos besoins. Ils sont apportés par la société d’abondance dans laquelle nous évoluons et par toutes les technologies qui mettent tout à notre portée et plus vite. Cependant, elles nous laissent un petit goût amer : un manque de sens.
La recherche de sens
- Or, du sens, nous pouvons en retrouver en :
- – Nous concentrant sur nos valeurs (épisode 75 J’identifie mes valeurs)
- – En nourrissant nos relations aux autres (épisode 79 Je créé du lien social)
- – Développant une meilleure connaissance de nous-mêmes.
- – En nous lançant dans des activités qui nous révèlent à nous-mêmes et renforcent notre confiance en nous (BdB 87 J’ose et 97 je découvre les vertus de l’effort)
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Se reconnecter à soi-même
Autre piste : se reconnecter à nous-mêmes et revenir à un état de conscience. Tous les comportements décrits plus haut sont des automatismes, des actes posés sans réelle intention.
Prendre conscience
Or, nous avons cependant plusieurs moyens de reprendre conscience de ce qui se passe.
Marquer des pauses
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- – D’abord, en marquant des pauses, en ralentissant ou en nous efforçant de retarder certains actes. Cela nous donnera le temps et/ou l’espace nécessaire pour interroger notre intention.
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- Par exemple, au lieu d’acheter tout de suite ce pull qui surgit dans une publicité dans mon flux Facebook, je vais y revenir plus tard. Ainsi, j’aurais eu le temps de repenser à cet achat, à son utilité, à mon besoin derrière. Peut-être que je vais finalement l’acheter. Mais pour une bonne raison que j’aurais mûrie et non de manière compulsive guidée par un algorithme qui me semble tenir la télécommande de mon portefeuille.
Ressentir
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- – Prendre une pause aussi pour ressentir ce que j’éprouve physiquement.
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- Par exemple, l’urgence de nous remplir remplace de plus en plus le plaisir de la nourriture. Il nous arrive même parfois d’oublier ce que nous avons mangé au repas précédent.
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- L’auteur nous invite à vivre une expérience sensorielle complète avec un aliment. Nous pouvons faire appel à tous nos sens pour vivre pleinement le moment passé à déguster cet aliment, sa couleur, sa texture, son odeur, son goût.
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- Prendre des respirations nous permet aussi de tenir éloignée l’urgence du présent. Prendre une courte respiration, une pause pour se demander si l’acte que nous allons poser est pleinement conscient ou plus automatique. Ceci est aussi un bon moyen de reprendre le contrôle de nos mécanismes primaires.
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- Ainsi, si je respire avant d’aller mécaniquement ouvrir le placard où il y a mon gros paquet de M&Ms, peut-être que je finirai par y aller pour vraiment les savourer. Ou bien que je réaliserai que je n’en ai pas si envie que ça.
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- Je vous invite aussi à réécouter les épisodes 122 sur la méditation et 103 sur l’introspection qui offrent des éclairages importants sur ces techniques de reconnexion à soi.
En bref si je résume
- 1. Notre cerveau cherche à obtenir 5 récompenses : la nourriture, le sexe, le statut social, le moindre effort et l’information.
- 2. Une fois que le cerveau identifie qu’un comportement apporte une récompense, il en veut toujours plus !
- 3. Ce système bien huilé nous met en action mais il nous conduit aussi à des comportements excessifs et automatiques.
- Pour reprendre la télécommande, nous pouvons remettre du sens dans nos actes, ralentir et mettre plus de conscience dans ce que nous vivons et faisons.
A vous de jouer chers auditeurs, piochez une carte de 2 minutes de bonheur ! et choisissez de marquer une pause avant vos prochaines décisions. Pauses au cours desquelles vous prendrez le temps de vous reconnecter à vous-même et à vos valeurs.
La petite mousse de la semaine nous est servie par quelqu’un que nous aimons beaucoup et qui a récemment rejoint les étoiles. C’est de Pierre Rabhi qu’il s’agit « La conscience est probablement ce lieu intime où chaque être humain peut en toute liberté prendre la mesure de sa responsabilité à l’égard de la vie.»
Avec Bulle de Bonheur, prenez le temps d’être heureux !