La sécurité affective… “Je me sens en danger face à toute nouvelles relations”, “j’ai du mal à créer des liens avec les gens”. Ou encore “je n’arrête pas de penser que mon conjoint va partir alors que tout se passe bien”. Comment se fait-il que je me pose toutes ces questions ? Pourquoi ai-je tant de mal à faire confiance aux autres ? Et là, ça me chicotte, comment puis-je faire pour être plus sécure affectivement ?

La genèse de la théorie de l’attachement

Les avancées scientifiques en psychologie clinique ont permis de mettre en lumière une nouvelle théorie sur les liens qu’entretiennent les personnes avec leur environnement. Elle s’appelle la théorie de l’attachement.

La théorie de l’attachement voit le jour au lendemain de la seconde guerre mondiale. Un psychiatre et psychanalyste britannique John Bowlby fait le lien entre carence affective et un développement social et affectif perturbé.

Pour construire sa théorie de l’attachement, John Bowlby s’est intéressé à l’éthologie ou la science des comportements animaux et particulièrement aux études de Konrad Lorenz et de Harry Harlow.

Konrad Lorenz et ses oies : la théorie de l’empreinte sur la sécurité affective

Dès 1935, Konrad Lorenz fait de l’élevage d’oies. Il observe que les bébés oies à peine sortis de leur coquille considèrent comme leur mère la première personne qu’ils voient.  Konrad Lorenz fait en sorte d’être la première personne que les bébés oies voient lors de l’éclosion. Il était donc connu dans le milieu scientifique comme “l’homme aux oies” car il avait des oies qui le suivaient partout dans son quotidien (https://www.youtube.com/watch?v=JGyfcBfSj4M) . Il élabore ainsi une théorie appelée la théorie de l’empreinte. Cette théorie explique l’acquisition rapide de comportement d’attachement social et de reconnaissance de sa propre espèce chez les ovidés. (Ce phénomène est moins observé chez les mammifères).

Une relation sécurisante et affective nécessaire pour un développement serein

Dans la continuité du travail de Lorenz, dans les années 60, le psychologue Harry Harlow mène une expérience avec des bébés macaques. Il sépare les nouveaux-nés singes de leur mère et les place auprès de deux substituts maternels. Un en fil de fer mais fournissant du lait – représentant la réponse à un besoin biologique de manger- et l’autre, recouvert de fourrure et donnant de la chaleur – représentant le besoin d’affection et de sécurité.

La question de la recherche était simple. Le bébé singe va-t-il préférer la mère fil de fer ou la mère fourrure ? Très rapidement, Harlow se rend compte que les bébés singes passent plus de 22 heures par jour sur la mère fourrure et ne vont voir la mère fil de fer que pour se nourrir. (https://www.youtube.com/watch?v=mS8lCjq5s4A).

Harlow en conclut le besoin immense des tout-petits davoir une relation sécurisante et affective pour un développement serein.

 

Le lien sécure prend naissance dès notre vie de nourrisson 

Le premier théoricien, cependant, du besoin de sécurité affective est John Bowlby. En effet, sous la houlette de Donald Winnicott, John Bowlby accompagne des enfants placés à la campagne loin de leurs attaches familiales et de leurs parents.

Dès 1940, les enfants dont les parents vivent dans des zones sinistrées par la guerre sont envoyés à la campagne. Parfois dans des conditions assez catastrophiques dans cette situation de guerre. Fort de ses observations et des travaux en éthologie, John Bowlby publie alors en 1944 une étude fondamentale qui va révolutionner la psychologie et la prise en charge du jeune enfant. Cette étude s’intitule “44 jeunes voleurs, leur personnalité et leur vie de famille”. Dans cette étude Bowlby s’interroge sur les conséquences d’une séparation longue avec les parents et le développement d’une inadaptation sociale.

Un rapport sur la sécurité affective

En 1951, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) lui demande un rapport sur les enfants sans familles. C’est un défi majeur de l’Europe d’après-guerre. Il démontre que les effets de la carence de soins affectifs dans la petite enfance donne par la suite “des relations affectives superficielles, une absence de concentration intellectuelle, une inaccessibilité à l’autre, au vol sans but ainsi qu’à l’absence de réaction émotionnelle” (rapport de l’OMS, 1951). L’impact de ce rapport fut énorme et révolutionna la prise en charge hospitalière des jeunes enfants. Cependant John Bowlby a été mis en porte à faux par ses collègues psychanalystes.

C’est dans ce contexte que la théorie de l’attachement va voir le jour.

 

La théorie de l’attachement pour la sécurité affective

La théorie de l’attachement évoque ainsi l’importance de la construction des premiers liens entre le tout-petit et son donneur de soins.

Ces premiers liens socio-émotionnels sont à la base du développement de l’enfant dans toutes ses dimensions. (Développement social et affectif, psychomoteur, langagier, cognitif et moral). Ces dimensions définissent le futur adulte dans sa relation avec son environnement.

En effet, l’être humain est un être social par nature et le nourrisson n’y fait pas défaut. Ce besoin de créer des liens et d’être dans une relation sécurisante et affective est aussi primordiale que manger, dormir ou boire.

La figure d’attachement principal et secondaire

Dans les premiers mois de sa vie, l’enfant va s’attacher à son donneur de soin principal. C’est-à-dire la personne qui va répondre le plus systématiquement à ses besoins de manière cohérente. En effet, c’est grâce aux signaux émis par le bébé comme les pleurs, le sourire ou le babillage que le donneur de soin va adapter son comportement face à l’enfant.

C’est le parent qui va prendre dans les bras son nourrisson en train de pleurer pour le nourrir, le changer ou le câliner.

Figure d’attachement principal

Ce donneur de soin principal est appelé aussi figure d’attachement principal.

Dans la majorité des cas, cette figure d’attachement principal est la mère de l’enfant.

En effet, il existe une orientation privilégiée du bébé, d’origine prénatale, vers ce qui est connu. Et donc une préférence sensorielle pour celle qui l’a porté dont il connaît l’odeur, la voix, le rythme cardiaque…

Cependant il peut arriver que la mère ne puisse pas s’occuper et répondre aux besoins de son enfant. L’enfant va alors se tourner vers la personne qui s’occupe le plus de lui et qui va répondre le plus régulièrement à ses besoins.

Ainsi la figure d’attachement principal peut être une autre personne que la maman. Comme le papa ou un grand-parent, un frère, une sœur ou autre.

Le plus important est l’adéquation de la réponse de cette figure d’attachement aux besoins du très jeune enfant dans les moments de stress que peut vivre le tout-petit (avoir faim, se sentir seul, avoir la couche trempée, avoir mal au ventre, aux dents… ).

En effet, plus cette personne va répondre de manière cohérente aux besoins du tout-petit, plus celui-ci développera par la suite une confiance dans son environnement et dans ses capacités à faire face aux défis du quotidien.

 

 

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Le lien d’attachement est comme un fil pour la sécurité affective

Nous pouvons illustrer le lien d’attachement entre le parent et son enfant comme un fil. En effet, dans les premiers moments de sa vie, le bébé crée un lien aussi fin qu’un fil de couture avec ses figures d’attachement. Plus ces personnes répondent de manière cohérente et adaptée à ses besoins, plus ce fil va se renforcer et s’allonger. Ce qui va permettre à l’enfant de construire sa confiance en lui. Mais aussi de renforcer sa base de sécurité et donc explorer son environnement en toute confiance.

Cependant dans les moments de stress, l’enfant va se tourner vers sa figure d’attachement présente pour être rassuré et repartir dans son exploration.

Exemple de situation de sécurité affective

Nous pouvons le voir très clairement dans les squares ou les parcs. Notamment lorsque les jeunes enfants jouent et découvrent de nouvelles personnes ou de nouveaux jeux. Il peut arriver qu’un enfant, en plein milieu de son jeu, va se tourner vers sa mère. il va lui demander son attention par un regard, une parole, un câlin avant de repartir jouer avec ses camarades.

Je vous entend déjà dire « mais existe-t-il d’autres figures d’attachement principal ? » Non, il y a une seule figure d’attachement principal. Cependant, il existe d’autres figures d’attachement appelées secondaires. Nous y retrouvons majoritairement le papa, les grands-parents, la nounou, l’instit’…

Toutes ces figures d’attachement permettent au tout petit puis à l’adulte d’explorer le monde en toute sécurité et ainsi pouvoir prendre des risques.

Si la figure d’attachement principale disparaît subitement, l’enfant se tournera naturellement vers d’autres personnes qui comptent pour lui.

Lien attachement mère enfant

Les 4 types d’attachement différents 

Selon Mary Ainsworth, élève de Bowlby, il existe 4 types d’attachement différents :

  • L’attachement sécure, 60% de la population. Cet attachement se caractérise par des enfants puis des adultes qui vivent la relation à leur environnement en confiance. Ce sont des personnes dont l’estime de soi est bonne, souvent extraverties avec une résistance au stress élevée.
  • Puis, l’attachement insécure évitant qui représente 25% de la population. Il se caractérise par des enfants puis des adultes vivant la proximité comme une menace. “Je ne peux compter que sur moi-même”. Ces personnes minimisent souvent leurs émotions et leurs besoins relationnels. Leur estime de soi est moyenne, ils sont souvent anxieux.
  • L’attachement insécure ambivalent. Il représente 20% de la population. Il se caractérise par des enfants puis des adultes qui ont peur de perdre l’être aimé. Ils ont un grand besoin de proximité avec l’autre tout en essayant de “tester” l’amour de l’autre. Ces personnes ont souvent des dépendances affectives fortes avec une amplification du négatif et minimisation du positif. Elles ont une faible résistance au stress et sont donc souvent très anxieuses.
  • Enfin, l’attachement insécure désorganisé. Il représente 5% de la population. Il se caractérise par des enfants puis des adultes qui fuient les relations sociales dans le style “vas-t’en mais ne m’abandonne pas”. Ils ont de grandes difficultés à gérer leurs émotions et leur image de soi est très négative.

Sachez que ces styles d’attachement ne sont pas figés et peuvent évoluer dans le temps. En effet, il est important de faire confiance à la capacité de résilience, de changement/ Mais aussi aux expériences de vie qui apportent confiance, ou aux personnes bienveillantes et bienfaitrices dans le parcours de vie qui font de chaque être humain une personne unique avec ses forces et ses failles.

Comment trouver  une sécurité affective

Ces différents types d’attachement se forgent dans les premières années de la vie. Ils sont la résultante de la manière dont nos figures d’attachement ont répondu à nos besoins. Ils nous permettent aussi de comprendre les relations que nous avons avec les autres. Et particulièrement avec les personnes qui nous sont chères : notre conjoint, nos enfants, nos parents, nos amis…

En tant qu’adulte comment devenir sécure affectivement

Pour les adultes qui s’identifient insécures, il est souvent difficile de gérer leurs émotions et principalement le stress. Et leur estime de soi est faible.

Afin de renforcer votre sentiment de sécurité, prenez le temps d’écouter et d’identifier vos émotions. “Est-ce que je suis en colère ou est-ce que je suis triste?” Ceci afin de mieux exprimer à l’autre ce que vous ressentez et vos besoins. #5 je nomme mes émotions – #12 J’identifie mes besoins.

Pour réguler le stress, il existe des techniques de respiration. Ainsi la cohérence cardiaque, une activité physique régulière mais aussi une routine bien établie peuvent vous permettre de trouver en vous des ressources afin de faire face au stress. #122 Je médite 5 minutes par jour.

Afin de travailler sur l’estime de soi, prenez conscience de vos forces et ressources #24 je reconnais mes talents. Sur une feuille blanche, écrivez votre prénom au centre et tout autour les sources de réconfort et d’espoir rencontrés dans votre vie.

Cet exercice vous permettra de travailler aussi sur votre optimisme et vos personnes ressources dans votre vie.

Il peut parfois être nécessaire d’entamer un travail thérapeutique avec un ou une professionnelle afin de mieux vous comprendre et identifier vos ressources.

Être un parent sécure pour mon enfant : une bonne sécurité affective

En tant que parent, vous pouvez contribuer à la sécurité affective de votre enfant en adoptant des comportements sécurisants.

En effet, John Bowlby a défini 4 caractéristiques pour une figure d’attachement sécurisante :

La force :

Le parent est une base de sécurité physique pour son enfant à travers les câlins. “Je me sens protégé par mon parent dans ses bras”.

Les câlins permettent aussi la sécrétion de l’hormone de l’amour appelée ocytocine qui induit bien-être et réconfort. #43 je distribue de la tendresse

La sagesse :

Le parent accompagne son enfant en posant sur lui un regard d’adulte. Ce regard est doté d’une vision du monde adaptée, réaliste et plutôt positive.

Cette sagesse va s’exprimer quand l’enfant vit une situation inconnue et/ou stressante (il est tombé, une séparation).

Le parent écoute le besoin de son enfant, met des mots sur l’émotion ressentie et permet à l’enfant de trouver des solutions à ses difficultés. (“Je vois que tu es triste de quitter papa ou maman. Je te propose un câlin pour te rassurer et tu as ton doudou, tétine, une photo que tu peux prendre avec toi quand tu te sens triste”).

Cela peut passer aussi par une demande d’aide extérieure. “Je ne sais pas comment t’aider mais nous allons réfléchir ensemble et trouver des solutions à ton problème”.

La sécurité affective :

Le parent représente un refuge, un havre de sécurité vers lequel l’enfant se tourne lorsqu’il est en détresse. Face à une situation de stress, le parent propose une réponse adaptée, cohérente et prévisible à l’enfant.

Par exemple, quand l’enfant se fait mal, l’adulte prend le temps de le consoler et de le rassurer. L’enfant va pouvoir se dire “quand je ne vais pas bien, je peux demander de l’aide et quelqu’un va s’occuper de moi. Ce que je suis a donc de la valeur, l’autre a de la valeur et le monde vaut la peine d’être exploré”.

Le soutien au développement :

Le parent permet la construction de l’individualité de l’enfant et l’aide à développer ses capacités à explorer le monde.

C’est-à-dire que l’adulte accompagne l’enfant vers son autonomie tout en lui permettant de faire des erreurs.

Il commence à manger tout seul. Je l’encourage et je le félicite quand il met la cuillère à la bouche même s’il en met un peu partout. Puis progressivement, quand l’enfant deviendra de plus en plus habile dans le maintien de sa cuillère, je pourrai lui demander de faire plus attention.

Ces comportements seront plus ou moins facile à mettre en place en fonction de son type d’attachement initial.

La sécurité affective, en résumé 

Si je résume,

1- Le besoin de créer des liens et d’être dans une relation sécurisante et affective est aussi primordiale que manger, dormir ou boire.

2- Être sécure affectivement provient de ce qui s’est passé dans notre petite enfance.

3- La sécurité affective influence notre relation à notre environnement, aux autres et à notre régulation émotionnelle.

4- La sécurité affective n’est pas figée dans le temps, elle se travaille en tant qu’adulte. Chaque parent peut mettre des choses en place pour favoriser la sécurité de ses enfants.

La petite mousse de cette semaine est tendre et nous est servie évidemment par John Bowlby. “L’attachement est un instinct conduisant tout au long de la vie à avoir besoin d’être écouté, entendu, compris et soutenu par une ou plusieurs personnes considérées comme proches.”

A vous de jouer chers auditeurs, 2 minutes pour identifier ce que je peux mettre en place pour augmenter ma sécurité affective !

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