La semaine dernière, l’enseignant de mon fils m’a alpaguée pour me dire combien mon enfant manquait de motivation, ajoutant que sans motivation la réussite est impossible.
J’ai pris conscience que moi aussi il m’arrive de me sentir dégonflée et incapable de trouver l’énergie et la motivation pour avancer ma liste de to do. Alors qu’à d’autres moments, je suis capable de déplacer des montagnes tellement j’ai envie que mon projet avance.
Que je sois manager, enseignant ou parent, je vois bien que certaines personnes sont dynamiques, créatives et vont de l’avant. En revanche, d’autres obéissent comme des robots sans trop réfléchir et là, ça me chicotte ! D’où viennent ces différences ? Comment faire pour maintenir cette motivation au zénith ?
La motivation c’est quoi ?
La motivation vient du latin movere bouger, elle est donc
- un motif pour bouger
- répond à un besoin ou à un désir
- alimentée par une énergie
- nécessite une direction
Nous pouvons donc dire dans un premier temps que la motivation est une force qui permet d’accomplir des choses.
C’est un sujet récurrent depuis l’Antiquité puisque les philosophes considèrent que la recherche du bonheur est l’exigence impérative à la base de la motivation. Depuis, elle a souvent été associée à l’organisation du travail.
Vision des économistes sur la motivation
Kant exprime deux origines de la motivation.
La première étant le devoir, tandis que la seconde est la satisfaction du désir. La plupart des gens doivent travailler pour vivre et donc il y a la motivation de satisfaire les besoins essentiels.
Taylor considère que l’homme est motivé uniquement par les gains financiers qu’il peut réaliser.
Selon Herzberg, la motivation au travail est liée à 2 facteurs, la satisfaction et l’insatisfaction qui agissent de manière indépendante l’une de l’autre.
La motivation explique pourquoi l’individu décide de faire quelque chose, combien de temps il soutient son action, et l’ardeur avec laquelle il la poursuit (Pintrich et Shunck, 1996 ; chercheur spécialisé dans la motivation de l’université de Michigan).
Le nombre de définitions du terme motivation est presque aussi grand que le nombre de chercheurs et théoricien sur cette thématique
Nous allons aujourd’hui aborder la motivation sous l’angle de la théorie de l’autodétermination. Elle a été conceptualisé par Deci et Ryan, 2 chercheurs américains en 2002.
Avant de commencer, rappelons que d’un individu à un autre le niveau de satisfaction des besoins va différer. Nous comprenons assez intuitivement que la motivation va dépendre des besoins que l’on a. Ainsi chacun est très motivé pour assurer sa subsistance chaque jour. Quelqu’un qui n’a pas mangé depuis plusieurs jours sera très motivé pour chasser, pêcher ou plus simplement aller faire ses courses.
Ce qu’il faut comprendre, c’est que plus les besoins primaires sont assouvis, plus les rouages qui expliquent le fonctionnement de la motivation sont complexes. En effet, c’est ainsi que l’on atteint les sphères du désir et de l’épanouissement personnel.
La théorie de l’autodétermination sur la motivation
Deci et Ryan, en 2002, vont à la suite de leurs recherches détacher 3 types de motivation :
La motivation intrinsèque :
Elle se manifeste lorsque nous nous lançons dans une activité de façon spontanée et libre pour l’intérêt ou le plaisir que nous y trouvons. En effet, l’activité étant sous le contrôle de l’individu et conforme à ses propres valeurs et attentes, elle lui apporte une forme d’autosatisfaction et de plénitude. C’est typiquement l’expérience d’un ado féru de lecture qui passe ses après-midis à lire compulsivement Harry Potter au lieu d’aller retrouver ses copains ou faire ses devoirs.
Il prend tellement de plaisir à lire qu’il est motivé à continuer son effort. C’est le plus haut niveau d’autodétermination.
La motivation extrinsèque
Elle nous renvoie à une activité effectuée pour des raisons qui nous sont extérieures. A l’inverse de la motivation intrinsèque dont je vous parlais avant, les objectifs extrinsèques pourraient se résumer en deux mots : pression sociale.
L’effet de groupe, de mode, les normes sociales, la culture qui nous forcent à devenir comme ci ou comme ça.
Par exemple, c’est lorsque je cherche à tout prix à perdre 5 kilos pour correspondre un peu mieux aux canons de beauté. Sans me demander si je me sens vraiment trop ronde en soi ou trop ronde par rapport aux autres.
Pour reprendre l’exemple de la lecture, c’est l’élève qui se force à terminer Madame Bovary juste pour obtenir une note correcte à sa fiche de lecture. Ou parce que s’il a une mauvaise note, elle risque de provoquer la colère de ses parents.
La motivation pour un but externe à l’individu
Dans la motivation extrinsèque, l’activité est poursuivie en vue d’atteindre un but externe à l’individu. Ce dernier est, en réalité, influencé par des facteurs extérieurs (la note ou l’engueulade). Mais aussi par des contraintes liées à son environnement propre. Cela le conduit à ajuster son comportement.
Motivation intrinsèque et extrinsèque
Parfois, la motivation peut être extrinsèque au départ et devenir intrinsèque.
Prenons l’exemple d’un enfant que ses parents inscrivent à un cours de musique. Il y va par curiosité au début puis peut être à reculons ou simplement sans rien dire. En effet, il voit que c’est important pour ses parents (nous sommes bien dans une motivation extrinsèque).
Si l’enfant est assidu à ses leçons de solfège et s’il est suffisamment intéressé, il pourra s’engager dans cette pratique pour voir de réels progrès. Il en retirera de grandes satisfactions. L’enfant peut prendre alors la décision de continuer. Sa motivation devient intrinsèque.
L’amotivation
Il s’agit de l’absence de motivation. C’est le cas lorsque nous nous lançons dans une activité sans savoir précisément pourquoi. Et sans savoir ce qu’elle peut nous apporter. Comme une sorte de résignation. Vous voyez, le jeune qui traine la savate pour travailler, le salarié qui fait juste ce qu’on lui demande sans rien remettre en question. Ou encore, le rendez-vous à prendre chez le dentiste qui reste des mois sur la liste de to-do…C’est bien sur le niveau le plus bas de l’autodétermination.
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Peut on avoir une influence sur sa motivation ?
Est-ce que les actions venant de l’extérieur augmentent la motivation intrinsèque de quelqu’un ? La diminuent-elles ou bien la laissent-elles inchangée ?
Expérience sur la motivation
Une expérience a permis de trouver réponse à cette question. Un groupe de jeunes aimant faire des puzzles a été séparé en 2. L’un des groupes touchait de l’argent s’il réalisait correctement des puzzles. L’autre faisait ses puzzles juste pour le plaisir. Le résultat est sans appel !
Les étudiants payés pour faire des puzzles sont devenus dépendants de la récompense. Alors que ceux qui ne l’étaient pas, continuaient de faire des puzzles pour le simple plaisir de les faire.
L’expérience est allée plus loin. Ils ont utilisé la menace dans le cas de la non-résolution des puzzles. Même constat, les étudiants menacés réagissent comme ceux qui sont payés. Ils deviennent dépendants de la menace.
Pour résumer, si une personne a une motivation intrinsèque et une récompense extrinsèque qui vient de l’extérieur comme une récompense ou une menace alors, sa motivation va à terme diminuer !
En revanche, si la récompense se fait par un feed-back positif en mots, en compliments, en encouragements, alors la motivation intrinsèque augmente. En effet, elle donne à la personne un sentiment de compétence et de détermination. « J’ai passé du temps à créer cette présentation, et mes collaborateurs m’ont remercié et félicité de mon travail. Je suis tout content ça me donne des ailes pour continuer ! »
Échec et motivation
Et dans le cas d’un échec, que se passe-t-il ? Sans surprise, que ce soit lors d’une tâche que la personne n’arrive pas à faire ou lors de rétroaction négative, la motivation intrinsèque diminue.
Contrôler sa motivation
Si je vais plus loin, donc, pour conserver une motivation intrinsèque, chacun de nous aurait besoin d’une forme de contrôle interne. Un contrôle qui viendrait valider que nous sommes en phase avec nos valeurs, en lien avec nos compétences. Cela nous donne une sorte d’autonomie.
Cette manière de voir va vraiment à l’encontre de ce qui se passe à l’école. Dès son entrée, l’enfant subit des récompenses extrinsèques avec les notes, le contrôle, la menace.
Ce contrôle interne, nous permet de préserver notre amour propre et notre sentiment de valeur personnelle. Maslow soutient d’ailleurs que ces contrôles internes sont moins angoissants et mènent à une plus grande solidité mentale.
En résumé pour garder une bonne motivation, donner des compliments et encourager est plus efficace qu’une carotte ou un bâton !
Les 3 besoins psychologiques fondamentaux sont des piliers de la motivation
Pour compléter, la motivation intrinsèque et le degré d’autodétermination peuvent être augmentés si trois besoins psychologiques fondamentaux sont satisfaits :
Le besoin d’autonomie
Il est satisfait lorsque nous nous sentons à l’origine de nos actions et de nos comportements. C’est aussi lorsque nous accomplissons des choses pour nous et non pour répondre à une attente extérieure ou pour atteindre un standard.
Par exemple, je veux être la personne qui choisis pour moi, en fonction de qui est important pour moi. J’ai trois enfants en bas âge, c’est important pour moi d’être présent auprès d’eux. Donc, je décide de prendre un poste à temps partiel pour pouvoir mieux m’organiser. Peu importe ce qu’en pense mon entourage. Je le valide avec mon conjoint et je me lance.
Encore, le besoin de compétence
Comme son nom l’indique, ce besoin est satisfait lorsque nous nous sentons capables, lorsque nous nous sentons efficaces pour accomplir certaines tâches parfois plus difficiles que d’autres.
Cela nous permet de prendre confiance en nous, de renforcer notre contrôle interne sur notre environnement. C’est source de nombreux bienfaits comme le sentiment de légitimité.
Par exemple, mon boss me demande un dossier fouillé sur un sujet pointu. Je suis un peu impressionné qu’il me le demande !
En y réfléchissant, je prends conscience que j’en ai les compétences. J’ai fait une spécialisation dans ce domaine lors de mes études. Faire cette présentation est un défi pour moi, je me sens prêt à le relever car j’en ai les compétences. Je vais sûrement beaucoup en apprendre !
Le besoin d’appartenance sociale ou besoin d’affiliation :
Comme nous vous en avions parlé dans notre Bulle de Bonheur #79 Je crée du lien social, » notre relation aux autres est un ingrédient indispensable à notre bien-être.
D’après Deci et Ryan, le besoin d’appartenance est satisfait lorsque nous nous sentons connectés à un groupe. Mais aussi que nous nous y sentons important. Nous l’avons confirmé lors d’une étude que nous avons réalisée pour mesurer l’impact de 2 minutes ensemble ! sur le bien-être des seniors autonomes.
Les résultats ont mis clairement en évidence que jouer aux cartes 2 minutes ensemble ! crée du lien social. Cela augmente en plus de manière significative la perception de l’intégration sociale et la réassurance de sa valeur. En résumé ,les personnes se sentent appartenir à un groupe qui les reconnait.
Ces relations avec les autres sont indispensables. Que ce soit dans le travail, dans le sport, dans la famille ou dans tout autre activité. Nous comprenons ainsi mieux toutes les difficultés psychologiques que nous rencontrons tous avec la pandémie et le fait d’avoir peu d’interactions avec les autres.
Notre besoin d’appartenance n’est plus rempli ! Et la visio ne remplace pas le présentiel. Nous avons besoin de nous voir en vrai !
Comment entretenir notre motivation
Connaitre ses forces
Plutôt que de s’intéresser aux manques, on s’intéresse aux ressources que développent la confiance en soi et le bien-être. Bulle de Bonheur #24
Peterson et Seligman définissent les forces de caractère comme les ingrédients psychologiques décrivant les vertus morales.
Ce sont 24 forces qui vont permettre à chacun de trouver sa motivation. Et ainsi de rester motivé dans ses tâches à accomplir.
Par exemple, ma force principale est l’honnêteté. Et donc, être comptable et fournir des comptes organisés est juste et cohérent avec cette valeur. Ma motivation sera importante pour mener à bien cette tâche.
Expérimenter le flow
Lorsqu’un individu réalise une action intrinsèquement motivée, il peut connaître un état de forte concentration, d’engagement. Mais aussi de contrôle de la situation et de clarté des objectifs, associés à un état affectif positif.
C’est une expérience au cours de laquelle les personnes sont très engagées dans leur activité au point d’oublier le temps ou bien de manger, de boire….
Mihaly Csikszentmihalyi, ce psychologue hongrois au nom imprononçable, a défini cette expérience de flow en 1990 dont on a parlée dans la Bulle de Bonheur #91
On a le sentiment alors que l’objectif est proche et que l’on va l’atteindre : on ressent du plaisir.
Cela a de fortes répercussions sur le bien-être et sur le bon fonctionnement personnel. Et permet à l’individu de persister dans sa tâche.
Être en lien avec ses valeurs
Le système de valeurs d’un individu se construit au cours de son éducation et de ses expériences personnelles. Il est important qu’il y ait une cohérence entre les valeurs et les actions. Une bonne correspondance entre valeurs et actions augmente le bien-être. Bulle de Bonheur # 108
J’ai décidé d’accepter un poste de commercial dans une association qui défend une cause qui me parle. En effet, je suis prête à accepter de recevoir une rémunération un peu inférieure à celle du marché car cette association a une mission qui correspond à mes valeurs. Et les collègues avec qui je travaillerai partagent aussi ces valeurs. Ça donne du sens à mon engagement et ça me motive.
Pour entretenir la motivation définissez des objectifs à court, moyen et long terme, en fonction des compétences et du but à atteindre. C’est essentiel !
Allez hop je me lance
Si je résume :
1- La motivation donne envie de bouger et répond à un objectif précis
2- Elle est souvent liée à nos valeurs et s’appuie sur nos forces
3- Compétence, autonomie et lien social sont directement connectés avec notre motivation
A vous de jouer chers auditeurs, tirez une carte de 2 minutes ensemble ! et rappelez-vous un moment où vous avez déplacé des montagnes. Quelles sont les sensations que vous aviez éprouvées ? A quelles forces avez-vous fait appel ? Quelles sont les valeurs que vous y avez trouvées ?
La petite mousse de cette semaine est à tester car elle a un goût nouveau « Si vous n’essayez jamais, vous ne réussirez jamais, mais si vous essayez, vous risquez de vous étonner vous-même » nous dit Charles-Augustin Sainte-Beuve. Alors soyez curieux !
Avec Bulle de Bonheur prenez le temps d’être heureux !