La faim émotionnelle… Nous avions envie de vous parler aujourd’hui de nourriture… Non pas de nourriture intellectuelle ou spirituelle, mais bien de nourriture alimentaire…
Non pas de recettes ni de menus mais d’une nourriture peut-être méconnue, bien que pratiquée par tous, la nourriture émotionnelle !
La faim
La faim est d’abord physique. C’est la plus courante, elle manifeste un besoin vital de notre corps et se révèle par différents moyens. Celui-ci va envoyer un signal pour faire comprendre au cerveau qu’il est temps pour lui de manger. Notre corps possède en effet un «baromètre» interne qui indique par deux signaux distincts quand il a besoin de calories (la faim) et lorsqu’il en a suffisamment reçu (la satiété).
Chaque signal se caractérise par des sensations corporelles :
- la faim se manifeste par des gargouillements, tiraillements, creux à l’estomac, voire fatigue, étourdissements. Mais encore irritabilité, perte de concentration quand la faim s’intensifie. Elle arrive donc graduellement. On commence à ressentir une légère faim qui se transforme en faim intense si on ne s’alimente pas.
- la satiété se reconnaît quand notre plaisir gustatif diminue, notre vitesse d’alimentation ralentit et une certaine lassitude apparaît.
La faim mondaine
Ensuite, il y a la faim « mondaine », celle qui se manifeste quand on est en groupe. On va manger sans nécessairement avoir faim, mais en prenant quand même du plaisir. Ce phénomène intervient généralement quand on est entre amis, en famille, en amoureux. Mais aussi lors d’un repas professionnel ou un évènement festif. Manger peut alors devenir un code de conduite, une forme de politesse, un moyen d’être en lien. La nourriture peut être alors familiale, relationnelle, culturelle.
La faim émotionnelle
Pour finir, il y a la faim émotionnelle, c’est à dire la « faim de la tête », par opposition à la « faim du corps ». La faim émotionnelle est une faim intense dès le début (contrairement à la faim physiologique), qui sert à répondre à une émotion forte ou désagréable : fatigue, angoisse, tristesse, euphorie… Elle ne comble donc pas un besoin physique en énergie, mais sert plutôt à apaiser, compenser un manque ou détourner un problème.
D’où vient la faim émotionnelle ?
Un rapport de l’ANSES de 2010 indique que l’alimentation humaine n’a pas seulement vocation à répondre à des besoins biologiques. La nourriture est aussi faite pour répondre à un équilibre psychologique. Pour reprendre le titre du livre « Cessez de manger vos émotions » d’Isabelle Huot et Catherine Senécal, tout le monde “mange donc ses émotions” à un moment ou un autre !
Manger pour parer à la déprime, pour combler l’ennui, pour se réconforter… Bref pour tenter de rétablir un équilibre psychologique ébranlé. L’enfant qui tourne en rond et qui demande “quand est-ce qu’on mange ?” Alors que cela fait une heure qu’il est sorti de table !
Le chocolat pour nourrir ses émotions
La tablette de chocolat avalée en 2 minutes dans un moment de découragement, ou encore les noix de cajou dévorées par poignées après une journée stressante et/ou épuisante de travail… Vous connaissez ?
Vous faites d’ailleurs peut-être partie de ces 42% qui mangent du chocolat pour lutter contre un état dépressif. Ou de ceux qui sont convaincus que c’est plus efficace qu’une séance chez le psy ! Sachez juste que si cela a un effet positif, cet effet est psychologique ! Car les quantités de phényléthylamine (« molécule de l’amour ») et de sérotonine sont présentes à des quantités si infimes qu’il faudrait manger au moins une tonne de chocolat pour obtenir le même résultat qu’un seul cachet de Prozac !!!
Le problème du chocolat (ou du Prozac), c’est qu’il ne règle pas le problème en profondeur. Comme le montre le psychiatre et psychothérapeute américain Roger Gould dans “Dites non à l’alimentation de consolation”. En effet, il note que la nourriture peut devenir une sorte de « tranquillisant vendu sans ordonnance », voire même de « transe alimentaire ». Ce moment où les soucis s’arrêtent, la nourriture est là, toujours disponible, et ne nous juge pas.
Modification du comportement alimentaire due aux émotions
Si des études ont démontré le lien entre émotions et alimentation, les recherches n’ont pas encore permis d’établir si toutes les émotions ou certaines d’entre elles seulement modifient les comportements alimentaires. De même, le rôle exact que pourrait jouer l’alimentation dans la régulation émotionnelle ou comportementale reste inconnu.
Quoiqu’il en soit, et comme nous l’avons souvent dit dans nos podcasts, le problème est surtout lié à l’excès. Ainsi, la faim émotionnelle sera sans conséquence tant qu’elle sera mesurée. En revanche, si elle devient fréquente, voire systématique, alors elle peut devenir problématique et être associée à des troubles du comportement alimentaire.
Conséquence d’une faim émotionnelle excessive
Nous ne sommes pas toujours à l’écoute de notre corps, et nous pouvons de ce fait faire des excès. Si le corps arrive à se réguler en cas de faim physique ou mondaine (si vous avez trop mangé à midi, vous aurez moins faim le soir par exemple), ce n’est pas le cas de l’alimentation émotionnelle. En effet, elle fait dérailler le mécanisme de régulation interne et entraîne 2 conséquences négatives.
- La première conséquence touche le poids et la santé. On mange en grande quantité, et plus que de besoin. En plus, en cas de faim émotionnelle, on se dirige rarement vers des carottes râpées, une plâtrée de haricots verts, ou même des fruits (que nous avons pourtant souvent sous la main !). Mais quasiment systématiquement vers des aliments hautement énergétiques et sans aucun intérêt nutritionnel. Les effets sont inéluctables : prise de poids, dégradation de la santé, dérégulation des sensations alimentaires de faim et de satiété.
- La deuxième conséquence est de tomber dans un cercle vicieux. On prend du poids, on perd confiance en soi parce qu’on a pris du poids, on se sent coupable, on tente de rectifier le tir, on se prive 2 jours et ça repart…
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Et si j’apprenais à gérer ma faim émotionnelle ?
La première étape est d’essayer de comprendre quelles sont les émotions qui se cachent derrière la prise alimentaire. Cela peut être ardu car tout en étant conscient de “manger vos émotions”, votre journée vous semble normale. Donc vous ne faites aucun lien avec des émotions précises. Il est possible également que vos émotions soient bien refoulées donc difficiles à identifier.
Selon Roger Gould, cette faim émotionnelle peut avoir cinq origines différentes, et se gérer par des stratégies autres qu’alimentaires.
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La première cause réside dans les doutes sur soi-même.
C’est l’exemple classique d’une demande de tâche à laquelle on ne sait pas répondre. Elle déclenche en nous un jugement négatif (« je suis nul »).
Se précipiter sur le distributeur pour prendre des barres de chocolat va peut-être vous faire du bien sur le moment mais a peu de chance de vous rendre moins nul !
Roger Gould conseille plutôt de répondre du tac au tac à cette voix critique intérieure. « Il est normal de ne pas tout savoir. Ce n’est pas parce que je ne sais pas faire quelque chose que je ne sais rien faire ». (précieux outil de la réfutation dont nous avions parlé dans notre podcast Bulle de Bonheur #29 sur les fausses croyances).
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La deuxième cause de la faim émotionnelle est la frustration
Elle survient généralement quand certains de nos besoins ne sont pas comblés (voir Bulle de Bonheur #12). Au lieu de compenser avec un paquet de gâteaux, il sera plus efficace de s’interroger. “Quels sont mes vrais besoins ? Comment puis-je y répondre ? Si ce n’est pas possible, comme puis-je trouver une autre source de satisfaction ?”. Par exemple, si je me sens triste car le comportement de mes enfants m’énerve et me donne un sentiment d’impuissance. Au lieu de manger la moitié du pot de Nutella quand enfin ils sont couchés, pourquoi ne pas les faire garder une heure par semaine ? Temps pendant lequel je pourrai me détendre, avec une amie, en faisant du sport ou simplement en me prélassant ? Quand les enfants vous énervent, il est très soutenant de penser à ce moment que vous allez passer pour vous bientôt.
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Une troisième cause peut être un manque de sécurité intérieure
Il arrive que des personnes ayant subi des traumatismes pendant l’enfance ressentent un sentiment d’insécurité permanente. Elles se mettent à manger de façon excessive, pensant inconsciemment que leur surpoids va les aider à les écarter d’une agression potentielle. Roger Gould conseille d’interpréter la situation de façon réaliste. Accepter que la nourriture ne protège pas et identifier les domaines concrets où l’on se sent vulnérables (finances, santé, conjoint, enfants…). Ceci pour trouver les moyens adaptés de surmonter ces difficultés. Une aide psychothérapeutique pourra être nécessaire.
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Une quatrième source est liée à une rébellion inconsciente
Plutôt que d’exprimer sa colère, on va manger, comme pour exorciser cette émotion qui monte en nous et qui pourrait nous faire accomplir des gestes regrettables. La solution est d’apprendre à gérer sa colère autrement que par la prise alimentaire (voir notre podcast Bulle de Bonheur #27). Pour d’autres personnes, cette rébellion s’exprime par l’idée que « la nourriture est la seule chose agréable que j’ai dans la vie, je ne vais donc pas y renoncer ». Ou encore « aime-moi d’abord comme je suis». Dans ces cas, il est important de renforcer son estime de soi (Bulle de Bonheur #7 et #24).
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Enfin, il arrive qu’on l’on mange pour remplir un vide, un manque
Ce sentiment est souvent lié à un sentiment d’abandon. Quand notre réservoir affectif est vide, on essaye de le remplir avec des aliments. Ceci, afin d’essayer de combler cette absence d’amour, cet appétit relationnel dont nous avons besoin pour vivre. Cette alimentation de consolation a des effets positifs de courte durée et peu efficaces pour répondre à notre besoin d’aimer et d’être aimé. Ce lien entre alimentation et manque est souvent lié à l’enfance. Donner à l’enfant quelque chose à manger pour le consoler ou pour le féliciter. Ou à l’inverse le priver de dessert pour le punir ou le priver de moments de qualité en famille… Tous ces évènements peuvent influencer notre rapport à l’alimentation et créer un lien de dépendance, souvent délétère, entre alimentation et amour.
Il est par conséquent important de prendre le temps de s’interroger sur les raisons pour lesquelles nous mangeons. Est-ce vraiment parce que nous avons faim ou est-ce pour répondre à un autre besoin ? Votre histoire est personnelle, et le lien que vous avez avec un aliment est unique donc écoutez-vous avant tout.
Le temps, l’objectivité mais aussi la compassion pour soi seront des outils utiles pour vous aider, sans oublier une aide professionnelle si besoin.
La faim émotionnelle en bref
- Nous sommes tous des « mangeurs émotionnels »
- Lutter contre la déprime, combler un vide, trouver un réconfort sont souvent les raisons de nos faims émotionnelles
- Il existe des stratégies pour combler notre faim émotionnelle, notamment en s’interrogeant sur notre besoin réel
Allez hop, je me lance ! Je dompte ma faim émotionnelle !
A vous de jouer ! La prochaine fois que vous avez faim, demandez-vous si vous avez vraiment faim ou si vous avez une faim émotionnelle. Si tel est le cas, prenez 2 minutes pour vous demander ce qui se cache derrière. Belle découverte !