En classe préparatoire, je pouvais passer 4 heures d’affilée sur un devoir de maths, complètement immergée dans le raisonnement. Je faisais un travail en profondeur et j’adorais ça ! Je me sentais tellement exaltée quand j’avais réussi à avancer même si je n’atteignais pas le résultat final. Et je n’ouvrais mon téléphone que pendant les pauses et encore. Aujourd’hui, je suis vissée à Teams et WhatsApp. Mon téléphone m’accompagne même aux toilettes et je suis bien incapable de maintenir ma concentration dirigée sur un unique objet pendant plus de 30 minutes. Je me sens tellement nulle parfois…

Et là, ça me chicotte. Est-ce que mon cerveau s’est ramolli ? Puis-je réapprendre à me concentrer ? Et comment ?

La pratique délibérée, le premier pas vers une concentration vertueuse

Qu’est-ce qui vous différencie de Mozart ? Le talent, me répondrez-vous sûrement. Parce que le talent, on l’a ou on ne l’a pas ! Et si je vous disais que vous êtes capable d’atteindre le niveau de Mozart, grâce à un super-pouvoir : la concentration !

Les travaux des psychologues de la performance ont démontré une chose intéressante. La qualité de notre apprentissage et donc de ce que nous sommes capables de produire, de livrer comme résultat, est directement fonction de notre capacité à maintenir notre attention sur un objet en particulier. Le psychologue suédois Karl Anders Ericsson a développé le concept de pratique délibérée.

Par la pratique délibérée, n’importe qui peut acquérir une compétence et devenir un expert dans le domaine. Exit le mythe du prodige ! La pratique délibérée nécessite 2 composantes bien précises et essentielles:

  • Une attention centrée sur la compétence que nous cherchons à acquérir
  • Une rétroaction qui nous permet de progresser en quasi continu

Rappelez-vous, ce sont aussi deux ingrédients indispensables pour que survienne l’expérience optimale théorisée par Mihaly Csikszentmihalyi. Je vous en ai parlé dans notre épisode #91 sur le flux. Autrement dit, si vous essayez de retenir quelque chose de votre lecture en écoutant de la musique et en vérifiant votre boite mail, vous ne risquez pas d’apprendre grand-chose.

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Que se passe-t-il dans le cerveau lorsque nous nous lançons dans un peu de pratique délibérée ?

C’est le journaliste et écrivain américain Daniel Coyle qui décrit ces mécanismes dans son essai The talent code. Une compétence est représentée dans notre cerveau par un circuit cérébral composé de neurones. Il existe une substance, la myéline, qui a le pouvoir de protéger ces circuits et d’accélérer la propagation de l’influx nerveux. Donc de faire en sorte que le circuit s’active plus vite ou en priorité sur les autres.

Or, lorsque nous nous concentrons délibérément sur une compétence en particulier – faire des gammes au piano par exemple – nous forçons le circuit associé à s’activer encore et encore. Ce qui déclenche les cellules qui viennent coller de la myéline tout autour de ce circuit.

Donc, lorsque je me concentre sur mes gammes, je solidifie cette habileté dans mon cerveau. Ce qui me permettra à l’avenir de l’exécuter plus rapidement et mieux. C’est le fait de nous concentrer qui permet d’isoler un circuit nerveux et de lancer la myélinisation.

A l’inverse, si je suis multi tâches dans mon travail, je déclenche aléatoirement et simultanément tellement de circuits dans mon cerveau qu’il ne sait plus quoi isoler et où travailler.

La concentration délibérée et vraiment isolée nous permet d’acquérir des habiletés bien précises et de les ancrer dans notre cerveau

Elle nous permet de développer nos forces (dont je vous ai parlé dans notre épisode #24 Je reconnais mes talents), ce qui nourrit notre confiance en nous.

Elle renforce notre sentiment de compétence et d’autonomie, deux parmi trois besoins psychologiques universels établis par les chercheurs de la théorie de l’autodétermination. Or, lorsque ces besoins sont remplis, nous ressentons plus de bien-être durable. Je vous renvoie vers nos épisodes #221 sur la motivation, #224 sur l’autonomie et  #227 sur la compétence.

La pratique de la concentration profonde et délibérée est souvent habitée d’une certaine gravité

Nous sentons bien que nous travaillons sur quelque chose d’important, qui compte. Ce qui nourrit notre sentiment de sens et notre satisfaction de nous-même.

A l’inverse, si nous avons passé notre journée à papillonner d’emails en coups de fil, en réunion sur des sujets divers et variés que nous avons chacun abordés de façon superficielle, nous nous sentons épuisés et frustrés à la fin de la journée. Il est moins fatiguant de passer une demi-journée à avancer sur un sujet difficile que de passer 8 heures à survoler des tâches rapides et faciles.

La maîtrise de notre attention nous permet de nous focaliser sur ce qui nous fait du bien et d’être plus heureux.

C’est l’objet du livre Rapt de Winifred Gallagher, psychologue comportementale. Elle y explique qu’elle a traversé un cancer en s’efforçant de mobiliser toute son attention sur ce qui lui faisait du bien : « le cinéma, la marche et le martini de 18h30 » selon ses dires.

Observant elle-même combien cela l’aidait dans sa maladie, elle passa plusieurs années à faire de la recherche scientifique sur le sujet et démontra que notre qualité de vie est directement liée à notre capacité à nous concentrer très fort sur ce qui va bien. Et à changer délibérément de regard sur nos circonstances. Nous avons bien plus de pouvoir que nous le pensons !

Diriger son attention vers le positif

Je vous invite à réécouter notre épisode #20 J’adopte la gratitude pour des pistes concrètes pour orienter votre attention vers le positif.

  • Mihaly Csikszentmihalyi observe aussi que lorsque nous sommes « dans la zone », dans le flow, c‘est-à-dire que nous expérimentons un épisode de flux, nous nous coupons du négatif. Nous sommes empêchés de regarder ce qui va peut-être un peu moins bien. Par exemple, j’ai passé une toute petite nuit parce que mon dernier est malade. J’ai eu un mal fou à me réveiller. Pourtant en ce moment, je ne ressens aucune fatigue, aucune douleur car je suis plongée dans l’écriture de cet épisode qui me passionne.
  • Être concentré à fond nous permet de rester dans l’instant présent et coupe court aux ruminations sur le passé et angoisses envers l’avenir. Je vous invite à réécouter notre bulle de bonheur #25 Je découvre le pouvoir du moment présent pour vous rappeler les bienfaits de se reconnecter au présent.

 

Le travail en profondeur ou « deep work » selon Cal Newport

Notre capacité d’apprentissage, de développement de nos compétences, notre épanouissement et notre bien-être passent aussi par notre aptitude à maintenir notre attention de façon dirigée et consciente.

Or, notre cerveau n’est pas gouverné pour le faire. Il est guidé par ses mécanismes primaires dont je vous ai parlé dans notre épisode #128 et qui font la part belle à notre circuit de la récompense. Notre cerveau nous pousse à chercher en permanence du plaisir et de la distraction.

Et c’est bien ça qu’il s’agit de pirater dans une époque que les américains qualifient de « attention-deficit epidemic ».

Comment remporter la bataille de l’attention contre les appels incessants de la récompense immédiate ? Faire preuve de volonté ? Oui, sans doute il en faut un peu. Cependant, la science a démontré que la volonté est un muscle qui se fatigue. C‘est pourquoi Cal Newport, dans son essai Deep work, retrouver la concentration dans un monde de distraction, nous conseille plutôt de mettre en place des routines et des rituels de travail en profondeur.

Le travail en profondeur se pratique en restant concentré sur une tâche cognitive longtemps et sans interruption. Lire, écrire, jouer d’un instrument de musique, apprendre quelque chose de nouveau, résoudre un devoir de mathématiques, faire une dissertation sont autant de domaines dans lesquels le travail profond améliore considérablement le résultat.

Cal Newport est professeur d’informatique aux Etats-Unis et il a lui-même expérimenté combien cette pratique lui a permis d’accomplir plus et mieux, de se rapprocher d’objectifs qui comptaient vraiment pour lui. Il a ensuite expliqué sa recette pour y arriver.

1.    D’abord, chacun peut choisir son approche qui peut être :

  • Monastique : cela suppose de s’isoler définitivement des sources de distractions. Ainsi, le célèbre informaticien Donald Knuth, père de nombreuses innovations technologiques, n’a aucune adresse mail et s’est rendu définitivement injoignable pour toute sollicitation qui l’éloignerait de son objectif.

 

  • Moins radicale : l’approche bimodale qui consiste à s’isoler par période au cours de retraites. C’est une pratique qui a beaucoup contribué au succès de Bill Gates.

 

  • Encore plus accessible : l’approche rythmique qui suppose que tous les jours à la même heure, vous vous mettiez en mode travail en profondeur. Cela suppose de connaître votre chronotype pour savoir à quelles heures vous serez le plus éveillé et efficace. Pour cela, je vous renvoie à notre épisode #171.

 

  • Et enfin, l’approche journalistique qui consiste à planifier des créneaux de travail profond dans votre agenda. C’est la méthode la plus compatible avec nos vies professionnelles faites aussi de réunions, d’emails et de collaboration en équipe. C’est aussi la plus accessible pour se lancer dans le travail en profondeur car au début, il est difficile d’opérer un changement radical. Le cerveau a besoin de réapprendre progressivement à se concentrer. Des plages de 3-4 heures, c’est déjà très bien. Aller plus loin demande de l’entrainement.

 

2.    Ritualiser ses périodes de travail

Cal Newport conseille de créer des rituels. Où ?  Pour quelle durée ? Comment ? Et quels petits ingrédients pour tenir sur la longueur ? Par exemple, moi je m’installe à mon bureau devant la fenêtre, je mets des boules Quies même si je suis seule à la maison. Je définis une heure de fin, je pose ma montre à côté de mon clavier et j’ai toujours une théière pleine en début de séance.

 

3.    Pilotez cette pratique comme une entreprise avec :

  • Un focus clair et défini qui correspond à ce qui est primordial selon vous. Établissez votre propre objectif stratégique.

 

  • Déclinez une stratégie qui vous permette d’atteindre cet objectif. Vous pouvez même définir des indicateurs de résultat, lorsque c‘est possible. Par exemple, le nombre de lignes de code produites ou bien la difficulté des pièces de musique jouées. Vous pouvez même recourir à un tableau d’affichage encourageant sur lequel vous inscrivez toutes les séances que vous avez tenues et vos progrès.

 

  • Enfin, gardez des moments réguliers dédiés aux bilans et à la planification des prochaines étapes. Dans le bilan, vous passez en revue vos objectifs ainsi que vos tâches ou projets inachevés. Et vous vous assurez d’avoir un plan d’actions qui vous permet de les accomplir. C’est une étape qui peut sembler inutile et chronophage. Cependant elle est vraiment importante car c’est le signal pour votre cerveau qu’il peut se débrancher.

 

4.    À côté de ces règles, Cal Newport recommande vivement de faire des pauses pour plusieurs raisons :

  • Avant tout, faire des pauses repose et restaure votre attention. La concentration est un muscle qui a besoin de repos.

 

  • Ensuite, les pauses favorisent l’émergence de nouvelles idées. D’après les chercheurs de la théorie de la pensée inconsciente, nous disposons de deux systèmes pour analyser les informations disponibles et prendre des décisions : la conscience et le subconscient. Les recherches menées par le psychologue néerlandais Ap Dijksterhuis démontrent que si nous laissons systématiquement notre conscience prendre les décisions, en pesant le pour et les contre, nous ferons un moins bon choix. Notre subconscient au contraire est comme une super base de données capable de gérer une quantité massive d’informations ambiguës. Les pauses ont donc cet effet salutaire de laisser le subconscient prendre le relais. Ce qui favorise la créativité, le changement de point de vue et l’apparition de nouvelles idées. Les pauses sont un petit pas de côté qui améliorent notre efficacité et la qualité de notre travail alors préservons-les !

 

  • Attention, ici. Le fait de consulter sa boite mail pendant un break ou de se remettre à bosser après le dîner par exemple maintient notre attention en alerte et empêche le cerveau de se reposer. Vous risquez d’être moins efficace lorsque vous vous y remettez pour de bon.

 

5.    Un autre facteur clef de succès inattendu : l’ennui.

Notre cerveau s’est habitué à la distraction. J’attends le métro, je sors mon téléphone et je scrolle un coup. Je rentre chez moi, j’écoute un podcast. Et je profite du trajet de bus pour écrire des messages, passer des appels, lire les nouvelles. Bref, nos cerveaux ont pris l’habitude d’être tout le temps distraits.

Cependant, les recherches prouvent qu’à force, nos cerveaux sur-stimulés ne sont plus capables de trier les informations et d’éliminer les non pertinentes. Je trouve qu’il est très intéressant de réaliser que ce n’est pas en stimulant en permanence notre cerveau que nous le musclons. Au contraire. Mettre un terme à notre dépendance à la distraction en accueillant l’ennui est une étape nécessaire pour réussir à travailler en profondeur. Comment faire pour faire de l’espace à l’ennui – si craint et rejeté par nos contemporains ?

Comment faire de l’espace à l’ennui ?

  • Soigner la qualité de nos pauses pour réapprendre à notre cerveau à tolérer l’absence de stimulation, de nouveauté, le vide. Une vraie pause veut dire une pause sans réseaux sociaux, sans scroll, sans mise à jour de sa boîte mail. Ce qui compte ici c‘est que le créneau hors ligne soit respecté. Peu importe qu’il y en ait peu dans la journée ou qu’ils soient peu fréquents. En laissant notre cerveau flotter hors ligne, il se défait de sa dépendance à la distraction. Il réapprend à séparer le désir de se connecter et la récompense qui s’en suit.

 

  • Deuxième idée : reprenez le contrôle sur votre temps pour faire de la place pour vos loisirs. Le temps est un tyran qui semble souvent prendre les commandes de nos vies. Cal Newport propose un remède, volé au président Roosevelt. Réduire systématiquement la durée allouée à une tâche de votre planning. En gros, faire la même chose plus vite, en acceptant quelques concessions sur votre perfectionnisme naturel. C‘est ainsi que Cal Newport réussit à enseigner à Georgetown, publier des articles sur la base de ses recherches universitaires et être présent pour sa femme et ses 2 enfants. Tout cela en finissant ses journées de travail à 17h30. Ça fait envie, non ?

 

  • Une autre idée : pratiquez la médiation productive. Il s’agit de se maintenir occupé physiquement pour laisser ses ressources cognitives se concentrer sur un défi professionnel donné. Vous pouvez aussi réécouter notre épisode #122 pour en savoir plus sur les bienfaits et les techniques de méditation.

 

6.    Ensuite, revisitez votre rapport aux réseaux sociaux à l’aune de vos objectifs.

Ils ont tous une utilité. Cependant servent-ils vos priorités à vous ? Si je souhaite écrire un roman, Twitter, Facebook, Instagram ou LinkedIn vont-ils vraiment nourrir mes recherches ? M’aider à structurer ma pensée et peaufiner mon style ? Si tel est le cas, les bienfaits apportés sont-ils suffisants pour contrebalancer la distraction potentielle, les risques de dispersion liés à l’usage des réseaux sociaux ? Cette étape exige vraiment un recentrage sur ce que vous souhaitez accomplir.

 

7.    Enfin, essayez de fuir la superficialité, les tâches artificielles

Quelques astuces :

  • Demandez-vous par exemple si vous êtes vraiment indispensable à l’exécution d’une tâche en particulier. Combien de temps faudrait-il former quelqu’un pour qu’il soit autonome sur cette tâche ?

 

  • Gardez en tête votre boussole : est-ce que ce que je m’apprête à faire contribue à mon objectif ?

 

  • Posez-vous cette question : sachant que mon temps est limité, qu’est-ce que je souhaite faire du temps disponible qu’il me reste ?

 

  • Autorisez-vous aussi à dire non et acceptez d’être injoignable.

 

  • Enfin, et c’est sans doute une des plus difficiles. Essayez de vous défaire de la pression à produire. C’est un fléau observé par Cal Newport chez les travailleurs du savoir. En l’absence de critères clairs pour évaluer leur performance car leur job consiste souvent à avancer des lames de fond qui prennent du temps, ils s’efforcent de démontrer leur valeur. En faisant beaucoup de petits choses de façon très visible. Répondre à des emails par exemple… Je vous invite à vous demander si c’est votre cas et si oui, à vous demander ce qui vous empêche d’arrêter. Vous pourriez être surpris par vos réponses.

 

Avec Bulle de bonheur, prenez le temps d’être heureux !

 

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En bref, si je résume pour favoriser un vrai travail en profondeur

  1. Mettez en place des routines et des rituels
  2. Préservez des vraies pauses
  3. Fuyez la superficialité

À vous de jouer chers auditeurs, cette semaine, la carte de 2 minutes de bonheur vous propose de dégager une heure et demi de travail en profondeur. Établissez un objectif précis et atteignable, fermez toutes les sources de distraction et observez comment vous vous sentez après cette première expérience.

La Petite Mousse de 2 minutes de Bonheur

« La personne que vous êtes, ce que vous pensez, ressentez et faites, ce que vous aimez est la somme de ce sur quoi vous vous concentrez. »

Winifred Gallagher

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