Être autonome, tout le monde pense l’être. Pourtant, quand ma mère m’appelle 3 fois par semaine… Parce que l’appli What’s app a disparu de son téléphone et qu’elle me demande de venir lui régler le problème. Ça m’énerve… D’autant plus qu’elle sait très bien utiliser la technologie pour s’acheter des fringues sur Vinted. Quand je fais les impôts, je demande 100 fois à mon chéri de valider ce que je fais alors que je remplis des formulaires bien plus complexes pour mon entreprise.
Et là ça me chicotte. C’est quoi être autonome au juste ? En manquer, c’est manquer de confiance en ses compétences ? Ou une flemme de ne pas faire soi-même ?
Quel est le principe de l’autonomie ?
En psychologie, l’autonomie, c‘est le fait de faire les choses librement, de pouvoir faire des vrais choix. Parce que nous nous sentons alignés, sans forcément dépendre excessivement des autres. Il en découle la capacité à résoudre des problèmes, à gérer son temps et à s’organiser. Et pour finir, être autonome induit une confiance en ses capacités et ses compétences. C’est aussi avoir la simplicité de demander de l’aide quand c’est nécessaire.
L’autonomie est un des 3 besoins psychologiques de base au côté de l’appartenance sociale et de la compétence. C’est un des leviers fort de la motivation identifié par les chercheurs de la théorie de l’autodétermination. Leur objectif a été de comprendre ce qui permet aux individus de se développer et de s’épanouir. Je vous les ai présentés dans notre épisode #221 sur la motivation.
Nous allons mettre de côté tout ce qui touche à l’autonomie financière pour nous attacher uniquement à cette autonomie personnelle.
L’autonomie nous concerne tous, quel que soit notre âge. Du bébé qui apprend l’endormissement autonome, à l’enfant qui met 3 heures à mettre les boutons dans la boutonnière. L’autonomie réclamée à grand cri par l’ado qui rabâche « je gère », au jeune pro qui découvre un métier. Ou encore au couple qui gère un équilibre nécessaire entre fusion et autonomie. Enfin, à la personne âgée à qui on retire une autonomie qu’elle souhaite conserver.
Être autonome est une base sécurisante pour sortir de sa zone de confort
Lorsque notre besoin d’autonomie est comblé, nous avons une base sécurisante sur laquelle nous pouvons nous appuyer lorsque nous sommes confrontés à des difficultés ou à des événements inconfortables. Ainsi, nous sommes plus résilients dans un environnement qui n’est peut-être pas 100% aligné avec nos attentes. Nous pouvons nous approprier les conditions qui ne dépendent pas de nous, les intégrer et agir en les prenant en compte. Et nous savons rebondir. Nous avons aussi développé le sujet de la résilience dans notre épisode #65. Et si le sujet de la sécurité vous intéresse, vous pouvez réécouter notre Bulle de Bonheur #153 sur la sécurité affective, dans laquelle nous revenons notamment sur le concept d’attachement.
Se sentir autonome, c’est donc aussi la base qui nous permet de prendre des risques, de relever de nouveaux défis, de nous dépasser et éventuellement de sortir de notre zone de confort – sujet que nous avons développé dans notre bulle de bonheur #57.
Comment mettre en place un environnement favorisant l’autonomie ?
Prendre le temps de l’écoute
Qu’il s’agisse de notre enfant, de notre élève, parent, collaborateur, la première étape consiste à nous mettre à sa place, à nous inviter dans ses baskets. En faisant l’effort de comprendre cette personne, nous avons accès à ce qui est important pour elle, à ses valeurs, à ce qu’elle considère comme un obstacle et comment elle réagit devant des difficultés. Nous accédons aussi à ce qui peut parfois l’empêcher d’agir. Par exemple, une de mes collaboratrices est passionnée par les sujets sur lesquels nous travaillons. Elle a une tendance à tout creuser en profondeur, même lorsque cela n’est pas nécessaire.
Au début, pour l’aider à gérer son temps, je dimensionnais l’effort à fournir à sa place. Je lui demandais de traiter certaines tâches en surface. Et surtout, je ne prenais pas toujours le temps d’écouter ce qu’elle avait pu lire et comprendre lorsque ça n’était pas utile pour nos priorités. J’ai vu sa motivation baisser. Une fois que j’ai compris ça, nous avons pu rééquilibrer les priorités de façon qu’elle puisse aussi dédier une partie de ses ressources à la recherche en profondeur. Elle est beaucoup plus efficace et motivée pour avancer sur le reste. Cette étape demande une bonne dose d’empathie. Je vous recommande de faire un petit détour par notre épisode #137 Je cultive la bienveillance pour creuser ce sujet.
Accueillir l’autre avec empathie
Toujours avec une bonne dose d’empathie, accueillez les difficultés de l’autre sans chercher à y pallier tout de suite. Peut-être qu’il va se planter, peut-être que cela va lui prendre plus de temps, plus d’énergie. Sans doute, les choses seront faites différemment de vous. Rattachez-vous à la valeur intrinsèque de l’apprentissage autonome. Nous nous approprions bien mieux ce sur quoi nous nous sentons avoir prise. Je vous recommande de laisser les autres chercher les ressources pour mener les choses à bien.
Favoriser les initiatives permet l’autonomie
Une fois que nous avons bien cerné cette personne, nous pouvons l’encourager à participer, à prendre des initiatives. Ceci est très important car cela permet à la personne de s’approprier la tâche, ce qui se traduit à une plus grande motivation pour se lancer et persévérer.
Lorsqu’il s’agit d’une nouvelle activité, nous pouvons orienter la stratégie de la personne, la soutenir si elle en ressent le besoin. Cependant, plus elle sera libre d’avancer à sa façon, plus elle s’y attèlera avec entrain et plus forte est la probabilité qu’elle la mènera à bien. S’il s’agit au contraire d’une tâche qui suit un protocole préétabli, la préparation des états financiers d’une entreprise par exemple, avec son lot d’utilisation de logiciels ultra normés, de vérifications hiérarchiques et d’échéances à respecter, un bon motivateur expliquera les raisons de suivre un tel processus. L’argumentaire permet aux gens de persévérer dans une tâche en autonomie parce qu’ils ont internalisé le pourquoi du comment et qu’ils y adhérent. Rappelez-vous c’est l’exemple du code de la route que nous suivons tous même si s’arrêter aux feux rouges rallonge nos temps de trajet.
Bannir les « il faut », « tu dois »
Enfin, dernière astuce, évitons le vocabulaire coercitif, les « il faut », « tu dois », « tu devrais ». Ils mettent de la pression et donnent l’impression d’être contrôlés par une force extérieure. Au contraire, dans la mesure du possible, laissons le champ des possibles ouvert.
Par exemple, dans le cas de mon fils de 7 ans qui doit pratiquer la lecture et rechigne à se lancer dans la lecture d’un roman complet. Trop long « je ne vais jamais y arriver », trop ennuyeux, de nouveaux mots qu’il n’allait pas comprendre…
Nous avons expliqué les bienfaits de la lecture sur tous ses apprentissages à venir. Et nous lui avons expliqué combien un roman amusant pouvait abattre toutes les difficultés qu’il redoutait. Puis nous avons laissé plusieurs options ouvertes ou semi-ouvertes. Longueur et niveau de difficulté du roman, moments dans la semaine dédiés à la lecture et leur durée. Et nous sommes allés ensemble en librairie pour qu’il puisse choisir ce fameux premier roman selon ses goûts.
Croyez-moi que lorsqu’au milieu des classiques de mon enfance, il a choisi Star Wars, oui oui un roman adapté des films, j’ai dû faire preuve de beaucoup de self-contrôle. Les premiers jours, il a fallu le rappeler à son plan puis il se l’est approprié, l’a revisité. Il n’avait pas pensé à la possibilité de bouquiner dans l’autobus scolaire. Il a même réembarqué dans le tome 2 qu’il était lui-même allé emprunter en bibliothèque.
Envie de multiplier les moments complices en famille ? D’apprendre à vos enfants à devenir autonomes par le jeu ?
Le jeu de conversation 2 minutes de bonheur® en famille est fait pour vous !
Être autonome permet d’agir par soi-même
Je voudrais vous parler d’une étude assez amusante menée par Paloma Dominguez et son équipe de l’Université de Grenade. Elle démontre que lorsque les enfants ont le choix, ils mangent plus de légumes. Bonne nouvelle pour les parents qui nous écoutent ! Voici quelques détails : 3 groupes d’enfants ont été confrontés à deux légumes qu’ils apprécient particulièrement.
- Au premier groupe, il est dit « Voici les 2 légumes. Vous pouvez en manger autant que vous voulez. »
- Au deuxième groupe, il est dit « Il y a les 2 légumes, lequel voudriez-vous manger aujourd’hui ? »
- Enfin les chercheurs sélectionnent un des 2 légumes pour le troisième groupe (toujours parmi les 2 les plus appréciés par les enfants). Et ils leur disent « Aujourd’hui, il y a ce légume ».
Puis, les chercheurs ont mesuré la quantité moyenne mangée par chaque groupe. Le résultat est frappant. Lorsqu’ils ont le choix, les enfants mangent beaucoup plus de légumes que lorsque ça n’est pas le cas.
Comme le démontre l’exemple des légumes, lorsque nous nous sentons autonomes, nous sommes plus enclins à agir par nous-mêmes. Nous nous sentons mieux motivés. Si j’ai le choix, je me lance. Tandis que si je me sens forcé ou que je dois absolument suivre un protocole préétabli, je résiste davantage. Certains malades sont bien plus aux manettes de leur guérison lorsqu’ils sentent que le personnel ou leurs proches leur lâchent un peu les baskets. Qu’ils peuvent décider eux-mêmes de ce qui est bon pour eux et que leurs souhaits seront respectés.
Être autonome dope l’estime de soi
Lorsque nous agissons en autonomie, nous dopons notre estime de nous-même. La recherche sur l’autorégulation dans les études c’est-à-dire la capacité des étudiants à s’auto-discipliner va aussi dans ce sens. Plus les parents et enseignants soutiennent l’autonomie des étudiants, plus ils leur apportent des défis bien calibrés et moins ils essaient de les contrôler, plus ces derniers persévèrent et se sentent épanouis dans la réalisation d’eux-mêmes. Dans ce contexte, leurs vies leur semblent aussi plus satisfaisantes. Satisfaire leur besoin d’autonomie leur permet à la fois de rester motivés et de ressentir plus de bien-être que les étudiants qui n’ont pas été soutenus.
C’est un cercle vertueux car être encouragé à explorer, faire des choses par soi-même pousse à relever des défis qui boostent l’estime de soi. Elle est elle-même un socle pour se déployer encore plus. Donc plus je me sens autonome, plus je nourris ma confiance en moi et plus je suis motivé à agir et ainsi de suite.
L’autonomie augmente la performance des individus
La recherche montre aussi que l’autonomie augmente la performance des individus. Par exemple, dans le cas de la pratique d’un instrument de musique. Une étude menée sur des étudiants d’écoles prestigieuses en Nouvelle-Zélande a démontré que plus ils se sentent autonomes dans leur travail, plus leur pratique de l’instrument est fréquente, plus les étudiants se tournent volontairement vers des pièces plus difficiles, et plus leur pratique est de grande qualité.
Acquérir de l’autonomie permet d’être plus heureux
En s’autonomisant, nous sommes aussi capables de prendre de la distance par rapport aux pressions extérieures culturelles, familiales… Et de poser des vrais choix qui correspondent à ce qui est vraiment plein de sens pour nous. C’est la différence que Ryan et Deci font dans la théorie de l’autodétermination entre les objectifs intrinsèques et extrinsèques. Les objectifs extrinsèques participent d’une vision plus hédonique du bonheur, la recherche de plaisir. Ils incluent l’argent, les biens matériels, le succès, la popularité, l’image que nous renvoyons aux autres.
Les objectifs intrinsèques répondent à une conception eudémonique du bonheur, c’est à dire que le bien ultime est le développement de chacun, de son esprit, l’élévation de sa personnalité. Ils incluent plutôt le développement personnel, la santé, la qualité des relations ou l’impact sur la communauté. Or, lorsque nous sommes concentrés sur ces priorités intrinsèques, nous améliorons sensiblement notre sentiment de bien-être et de satisfaction dans la vie. En bref, nous sommes plus heureux.
Une étude longitudinale au nom assez cocasse et particulièrement pertinent « Choisissez bien vos souhaits » a été menée par Christopher Niemic, un autre professeur de l’université de Rochester. Son équipe et lui ont interrogé des étudiants en fin d’études sur les objectifs qu’ils allaient poursuivre à leur sortie d’école.
Un an après, il est retourné auprès de ces étudiants pour voir ce qu’ils étaient devenus et mesurer leur bien-être. Il est incroyable d’observer qu’il n’y a aucune corrélation entre l’atteinte d’objectifs extrinsèques comme gagner plus d’argent ou devenir plus puissant, plus populaire et le niveau de bien-être. Au contraire, l’atteinte d’objectifs extrinsèques multiplie les risques de dépression, d’anxiété et même de problèmes physiques. A l’inverse, tous les étudiants qui avaient poursuivi et atteint des objectifs comme entretenir des relations durables, contribuer à des projets qui ont de l’intérêt pour la collectivité étaient tous devenus plus heureux.
Donc poursuivre des objectifs libres guidés par notre autonomie rend plus heureux !
Le sentiment d’autonomie augmente la vitalité
Enfin et non des moindres, les chercheurs de la théorie de l’autodétermination ont démontré que le sentiment d’autonomie augmente aussi le bien-être physique, ce qu’ils appellent la vitalité. La vitalité c’est l’énergie disponible ressentie par une personne. Généralement, c’est une variable que nous sommes tous capables d’évaluer pour nous-mêmes. Toutes les études vont dans le même sens. Plus nous sommes contrôlés dans nos façons de faire, moins nous ressentons de l’énergie pour accomplir ce qui doit être fait.
Certains chercheurs qui se sont intéressés à l’auto-discipline ont même dû revoir leur copie en constatant l’importance de l’autonomie sur le bien-être des individus. Ils avaient précédemment démontré que lorsque les gens sont forcés à accomplir quelque chose qui demande de l’attention ou de la discipline, de poser des actes auto-régulés, ils s’épuisent. C’est la tradition de l’épuisement de l’ego.
En y regardant de plus près, ils se sont rendu compte que toutes les études portaient sur des choses pour lesquels les personnes observées devaient se forcer. Ce qui leur ôtait tout sentiment d’autonomie. En faisant bouger cette dernière variable, le résultat est sans appel : l’effet d’épuisement ne se manifeste pas, la personne gagne en énergie.
Être autonome à la retraite
Il est par exemple très intéressant d’observer les gens qui partent en retraite après une vie de labeur. Ceux qui s’adonnent à leurs passe-temps, font des projets, partent s’installer ailleurs ou voyagent. Ils prennent le temps de découvrir de nouvelles activités. Ils ressentent un profond bien-être, une grande vitalité dans cette période de rupture. Parfois, ils sont même plus énergiques que des gens de 20 ans de moins !
Agir en autonomie leur permet de combattre leur impression parfois d’avoir perdu leur utilité, leur capacité à contribuer. Cela les préserve de la tristesse, de l’abattement. Et parfois même de la dépression qui surgit trop souvent au cours de cette période bouleversante.
Prenez le temps d’être heureux et inscrivez-vous à notre newsletter #lapétillante et recevez un bon de 5% de réduction sur toute notre boutique
En bref, si je résume, être autonome
- Permet de poser de vrais choix
- Augmente l’estime de soi
- Favorise l’autonomie des autres
A vous de jouer chers auditeurs. Cette semaine, la carte de 2 minutes de bonheur vous propose de faire un petit pas et de choisir d’être autonome. En prenant une décision simple par vous-même et en assumant la responsabilité de votre action. Allez, osez !
La Petite Mousse de 2 minutes de Bonheur
« S’il existe une solution à ton problème, pourquoi te plains-tu ? S’il n’en a pas, pourquoi te plains-tu ? »
En résumé, pour arrêter de se plaindre
- Pratiquer la gratitude
- Cultiver une attitude constructive
- Refuser de tout contrôler
A vous de jouer chers auditeurs, la carte de 2 minutes de bonheur vous propose de noter les soupirs et vos lamentations et d’essayer de les transformer en actions positives.