Les regrets avant de mourir sont souvent des leçons puissantes transmises par nos aînés.
J’aime beaucoup ma grand-mère. Elle est sage ; elle me raconte sa vie, me partage ce qu’elle en a retenu, ses remords. Elle me donne des conseils pour mener la mienne. J’écoute attentivement, je trouve ses expériences de vie toujours touchantes. Cependant, je reconnais que souvent je n’accorde qu’une importance moyenne à ses recommandations. À époques différentes, défis différents, non ? Que pourrait-elle comprendre de mon quotidien aujourd’hui ?
Faire le bilan de sa vie, repenser ses choix, c’est une réflexion qui semble lointaine, ça me fait peur. Je crains presque que ça me porte malchance d’y penser. Et pourtant ça me chicotte : quelle est la sagesse que je peux retenir de nos échanges ? Peut-être que comprendre ces regrets de fin de vie peut m’aider à mieux avancer aujourd’hui ?
Bronnie Ware et les 5 regrets des mourants
Qui est Bronnie Ware ?
Bronnie Ware est infirmière en soins palliatifs en Australie. Dans le métier qu’elle exerce, elle reçoit les confidences les plus intimes de ses patients sur leur lit de mort. Elle observe combien l’approche de la mort libère la parole et elle commence alors à répertorier les réponses à la question « Parlez-moi de votre vie ». Les mourants expriment souvent des regrets et elle est frappée et touchée de constater qu’ils sont majoritairement identiques. De cette expérience, elle a tiré un ouvrage puissant à l’instar de son titre Les 5 regrets au moment de la mort.
Je voudrais vous les présenter chacun et vous proposer des pistes de réflexion pour agir dès aujourd’hui.
Pour dire à ses amis, sa famille pleins de belles choses et partager un moment qui restera ancré en mémoire !
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J’aurais aimé avoir le courage de vivre comme je le voulais
Voici le regret le plus fréquent, ce qui souligne que la majorité des gens priorisent les attentes des autres sur leurs propres besoins et envies. Cela vient sans doute de notre besoin d’appartenance. Comme vous le savez, c’est un des besoins fondamentaux identifiés dans la pyramide de Maslow dont l’objectif est de répertorier et hiérarchiser les besoins des êtres humains.
Pourquoi cherchons-nous tant à plaire aux autres ?
Après avoir satisfait nos besoins psychologiques et de sécurité, notamment affective, nous avons besoin de nous sentir connectés et reconnus par les autres. Pour ce faire, nous pouvons aller contre notre nature ou nos envies pour ressembler aux autres et créer des passerelles, des connexions avec eux.
C’est notamment une étape bien connue de l’adolescence où les jeunes traversent souvent une quête identitaire au cours de laquelle ils se construisent en relatif au groupe. Soit pour y appartenir soit en affirmant leur singularité. Bonnie Ware observe que beaucoup de ses patients regrettent ainsi de ne pas avoir suivi leurs rêves et de s’être efforcés de se conformer à l’image que les autres se faisaient d’eux ou à leurs attentes.
Comment oser être soi-même ?
Rappelez-vous notre épisode #141 Je ne peux pas plaire à tout le monde dans lequel je vous parlais des travaux de la chercheuse texane Brené Brown. Ses recherches ont démontré que nouer des relations profondes et de qualité qui sont nécessaires à mon bien-être commence par m’aimer moi-même et m’accepter comme je suis.
M’aimer commence par apprivoiser ma honte, mes imperfections et me montrer authentique auprès des autres. Je pense à mon amie qui essayait d’assurer sur tous les fronts, ce qui la rendait parfois maussade, souvent insatisfaite et rancunière, rarement épanouie. Du jour où elle a abandonné sa cape de Wonder Woman, elle a redécouvert sa famille et a pu renouer des relations beaucoup plus apaisées avec ses proches. Peut-être que lorsque sera venu le moment de quitter ce monde, elle ne partagera pas ce regret.
J’aurais aimé ne pas travailler si dur
Voici un regret observé chez plus d’hommes que de femmes. N’oublions pas cependant qu’à l’époque de l’étude, il y avait moins de femmes ayant eu une carrière professionnelle. Je trouve qu’il est particulièrement intéressant de constater combien ce regret résonne avec nos expériences actuelles. Selon une étude Statista datant de 2023, 25% des français se disent insatisfaits de leur équilibre vie personnelle – vie professionnelle et 71% déclarent manquer de temps. Un sentiment plus aigu pour les parents d’enfants en bas âge.
Et pour cause ! Bronnie Ware observe combien ses patients regrettent d’avoir privilégié le travail au détriment du temps passé avec leur partenaire ou leurs enfants pendant des années qui ne reviendront pas. Je trouve que ce regret fait vraiment écho à ce que nous connaissons maintenant des composantes du bien-être profond.
Martin Seligman le père de la psychologie positive a développé le modèle PERMA dont je vous parle dans notre podcast #240 et les relations épanouissantes ressortent comme un déterminant central pour nous sentir pleinement bien.
Trouver un équilibre entre travail et vie personnelle
Petit point d’attention cependant. Loin de moi l’idée de rejeter en bloc la valeur travail. Les chercheurs de la théorie de l’autodétermination ont montré que nous avons tous 2 besoins psychologiques fondamentaux qui s’ajoutent à celui de lien social : les besoins de compétence et d’autonomie. L’autonomie fait référence à notre capacité à nous sentir indépendant, en capacité de prendre nos propres décisions et de poser nos propres actes sans dépendre d’un tiers.
La compétence est le fait de nous sentir efficace pour faire ce qui nous tient à cœur, de relever des défis et de nous développer. Ces 3 composantes : appartenance, compétence et autonomie sont essentielles à notre bien-être et nous maintiennent motivés.
J’ai développé ce thème dans notre bulle de bonheur #221 sur la théorie de l’autodétermination. Tout l’enjeu amené par ce regret est d’arriver à définir un certain équilibre entre le travail et la vie personnelle qui soit ajusté avec nos besoins et notre contexte. Et puis d’adopter une certaine souplesse par rapport à ça. Car un équilibre, par définition, est mouvant. Nous sommes dans une ère de la performance qui nous pousse à travailler souvent plus. Je sens bien quand je sors avec des amis combien c’est branché de se dire débordé, d’être sous l’eau.
Il y a aussi une culture du présentéisme virtuel – comprenez être joignable sur Teams ou via email jusque tard dans la soirée et lors de nos jours de congé. Cependant, cette culture est assez pernicieuse car elle établit un standard qui laisserait croire que c’est la norme et que l’exception serait de faire son travail aux heures régulières.
Prenons conscience de la place que nous donnons au travail. Et en référence au 1er regret, demandons-nous si cela est ajusté à nos aspirations intimes ou une injonction internalisée, une croyance qu’ainsi nous serons acceptés.
J’aurais aimé avoir le courage d’exprimer ce que je ressentais
Pourquoi réprimons-nous nos émotions ?
Je reconnais une tendresse particulière pour ce regret. Bronnie Ware observe combien de nombreux patients ont mis un couvercle sur leurs ressentis pendant toute leur vie et ont réprimé leurs émotions, de peur d’être rejetés par les autres. C’est une croyance souvent issue de la petite enfance et appuyée par une culture répandue que les émotions sont quelque chose d’inapproprié, de puéril, une marque d’immaturité. Rester d’humeur égale, de marbre est même souvent perçu comme une force de caractère valorisée des gens qui justement « ne se laissent pas dompter par leurs émotions ».
Or, nous le savons maintenant : c’est tout l’inverse. Les émotions sont un atout formidable dans notre manche. Elles nous informent sur notre réaction par rapport à un déclencheur. Elles font ressortir nos besoins, nos aspirations profondes et nous permettent de mieux nous connaître.
En rentrant après ma journée de travail, je me sens émerveillée et apaisée par la neige qui tombe en lourds flocons de notre beau ciel québécois. Mes épaules et ma mâchoire se décontractent, mon esprit se met en pause – peut-être ai-je besoin de ralentir en ce moment ? Peut-être que le silence de mes pas étouffés par la poudreuse qui recouvre les trottoirs m’indique qu’en ce moment je cherche le calme.
Comment communiquer nos émotions ?
Si ce sujet vous intéresse, je vous invite à réécouter notre bulle de bonheur #140 Je suis émotionnellement intelligent. Dans cette bulle de bonheur, je vous parle notamment des compétences émotionnelles dans laquelle figure notre capacité à communiquer nos émotions. Voilà qui fait écho aux regrets rapportés par Bronnie Ware. Au-delà de reconnaître nos émotions, nous pouvons muscler notre capacité à en parler de façon constructive. Même sur le moment présent, si la mayonnaise vous est montée très très fort au nez, vous pouvez communiquer avec clarté votre ressenti.
Pour ce faire, nous vous conseillons de parler de vous-même et de faire preuve d’auto-compassion :
- Employez le « Je » informatif au lieu du « Tu » ou du « vous » accusateur. C’est un principe de base de la communication non violente qui permet d’aborder des sujets délicats ou des conversations difficiles sans nuire à la relation.
- Exprimez votre interprétation, votre ressenti par rapport à la situation.
- Soyez factuel, respectez vos émotions et partez à la recherche de la valeur touchée. Elles ne sont pas moins valables que celles de votre interlocuteur.
Je vous donne un exemple.
Ma boss a montré un désintérêt grandissant pour les projets et les travaux que je menais. Je constatais que son esprit était ailleurs lorsque je lui parlais ou que je lui faisais des recommandations. Un jour, je lui ai parlé des signaux que j’avais observés dans ses comportements et de comment je les avais ressentis. Elle a reconnu que mes interprétations étaient valides, m’a renouvelé son intérêt et sa confiance et m’a expliqué les raisons de son détachement. Cette discussion m’avait beaucoup stressée. Et je crois que je suis ressortie fière de moi et reconnectée avec l’équipe. Ceci n’aurait jamais été possible si je n’avais pas pris le risque de me montrer vulnérable.
La vulnérabilité, un atout pour des relations authentiques
C’est un des sujets sur lesquels je voudrais vous amener : la vulnérabilité est la base sur laquelle s’établit une relation profonde entre 2 personnes. Je l’ai abordée dans notre épisode #49 Je montre ma vulnérabilité. La vulnérabilité est souvent un peu contre nature. Elle suppose d’accepter de lâcher prise, de laisser venir l’inconfort et l’incertitude. Se montrer vulnérable c’est accepter de laisser tomber le masque que nous portons tous plus ou moins souvent. Ceci pour laisser l’autre voir notre vrai visage, nous montrer tel que nous sommes.
Ce courage est une force qui nous connecte aux autres. Nos proches peuvent mieux se relier à ce que nous partageons ou ressentons. Se montrer vulnérable c’est aussi inviter l’autre à l’être. Enfin, être vulnérable c’est aussi accepter que nous sommes suffisamment bien ou bon tel que nous sommes. De telle façon que nous n’avons pas besoin de nous présenter différemment. C’est une marque de dignité personnelle, de respect et d’estime de soi.
Exemple de vulnérabilité
Je vous donne un exemple. Mon ado a passé un week-end complet à se plaindre de tout, en paressant sur le canapé sans participer aucunement à la vie de la famille.
Râlant que nous ne lui proposons pas un programme assez excitant, que toutes les occupations sont nulles ou lassantes. Ou qu’il est crevé et que personne ne s’occupe de lui. Je reconnais que passé quelques heures, j’ai dégoupillé et me suis mise à lui lancer moi aussi tout un tas de reproches en criant. Résultat des courses : il est monté dans sa chambre et on ne l’a plus revu de la soirée ni le lendemain matin. Il ne m’a pas adressé la parole.
Clairement, s’être lâchée, certes, sur le moment, ça m’a fait du bien. Cependant, j’ai creusé la brèche entre nous et je ne suis pas soulagée dans le fond. Le soir, je suis allée le voir en lui expliquant que je ne comprenais pas comment l’aider. Il m’a confié ce qui le traversait en ce moment. Il m’a raconté des choses aussi sur sa vie au collège qui ont permis de remettre du contexte dans tout ça. Nous n’avons rien révolutionné, cependant nous avons renoué la relation en nous respectant l’un l’autre et en accueillant nos émotions respectives.
Votre entourage appréciera souvent que vous vous ouvriez le kimono pour partager comment vous vous sentez et pourquoi. Finalement c’est aussi une preuve de confiance en l’autre.
J’aurais aimé rester en contact avec mes amis
Je cite Bronnie Ware : « Beaucoup étaient devenus tellement pris dans leur propre vie qu’ils avaient laissé passer des amitiés en or au fil des ans. Il y avait beaucoup de regrets profonds de ne pas avoir donné aux amitiés le temps et les efforts qu’elles méritaient. » Il me semble que c’est un autre regret aussi particulièrement émouvant.
Je ne vais pas revenir sur l’importance du lien social. Les chercheurs sont très nombreux à avoir démontré combien être connecté aux autres est essentiel au bien-être et à l’épanouissement de chacun. Et ce, dès la petite enfance. C’est mon leitmotiv en créant les jeux 2 minutes de bonheur.
Pourquoi perdons-nous nos amitiés avec le temps ?
Ce que je trouve intéressant ici c’est d’explorer la concurrence entre nos multiples priorités. Il y a la vie, ses contraintes, ses obligations, le travail, la famille. Ou encore les contingences matérielles, les proches, les envies, les hobbies… Dans une époque du toujours plus et du toujours plus vite dans laquelle nos cerveaux sont surstimulés par la nouveauté permanente, il est difficile de faire la clarté. D’ailleurs, si vous voulez comprendre pourquoi nous nous sentons souvent débordés, je vous recommande d’écouter nos épisodes #128 sur les mécanismes primaires de notre cerveau et #97 sur la concentration.
Pour en revenir au rythme effréné de nos vies, il est intéressant de nous demander à quel point nos agendas sont intentionnels ou subis. Quelle est notre part de liberté dans les sujets ou les tâches auxquelles nous accordons notre temps physique ou même notre temps de cerveau disponible ? Pour ce faire, je vous recommande un petit pas de côté avec 3 verbes tout simples. Je peux / je dois / j’ai envie. Je vous ai parlé de cet exercice dans notre podcast #10 sur les priorités.
Passez vos activités au tamis de ces 3 façons de les envisager. Je vous donne un exemple bien connu des parents : les repas. C’est fatigant parce que comme disait mon père « ça revient tout le temps » ! Je dois nourrir mes enfants 3 fois par jour. Je peux décider du niveau de sophistication de ce que je prépare. J’ai envie d’essayer de réduire progressivement la viande de notre alimentation.
Dans mon cas, je passe une partie significative de mon temps à la maison dans ma cuisine sans plaisir. Et cela me vole du temps sympa avec des copains ou les enfants. Pour qu’à la fin, tout le monde râle devant mon dahl de lentilles ou mon gratin de brocolis. Alors j’allège la pression que je me mets toute seule. En alternant un repas qui demande de la préparation et quelque chose d’ultra simple ou de carrément tout fait. Je réduis mon niveau d’exigence envers moi-même et je reprends le contrôle de mon temps.
Comment entretenir ses amitiés malgré un quotidien chargé ?
Par ailleurs, l’amitié ça s’entretient. Même si cela peut sembler contre-intuitif, entretenir une amitié représente certainement un effort ou une discipline. Et si nous ne le priorisons pas, c’est comme le couple, c’est la première chose qui saute dans un quotidien chargé. Je vous donne mes 2 astuces d’expatriée qui pourraient s’appliquer à n’importe lequel d’entre vous :
- Créer une routine : je ne laisse pas passer plus de X semaines sans envoyer un message vocal à certains excellents amis. Même lorsque je n’ai rien d’extraordinaire à raconter.
- J’ai un carnet qui me suit partout et lorsque je vis une situation ou quelque chose sur lequel j’aurais aimé interpeller mon ami, je le note. Lorsque je fais mon message vocal – je pense qu’il s’agit presque de podcasts parfois – je reprends mes petites notes. Je ne me force pas à donner des nouvelles. Souvent je leur parle comme si nous étions à côté, qu’il n’y avait pas la pression de la distance et que nous papotions d’un événement vécu ensemble. Et figurez-vous que je pense même être plus proche de certains amis aujourd’hui que lorsque nous vivions à 3 arrondissements de distance.
J’aurais aimé m’autoriser à être plus heureux
Ce dernier regret est une forme de synthèse. Bronnie Ware rapporte que ses patients regrettent souvent d’avoir été dominés par leur recherche continue de toujours plus de plaisir et d’occupations divertissantes. Cela au détriment de la recherche d’une vie pleine de sens.
Le bonheur : plaisir immédiat ou quête de sens ?
Il y a une grande différence entre la vision hédoniste et eudémonique de la vie. Dans le premier cas, nous cherchons toujours plus de plaisir, car notre cerveau n’est pas fait pour se satisfaire de sa dose, il en veut toujours davantage. C’est souvent un cercle vicieux aliénant.
Dans la deuxième, c’est le fait d’être connectés à ce qui fait du sens pour nous, à nos valeurs, à ce qui compte à nos yeux qui est le socle de notre bien-être profond et durable. Les patients regrettent souvent que leur vie ait manqué de profondeur. Par peur du changement, par habitude ou par conformisme, ils regrettent d’avoir refusé l’inconfort lié aux questionnements plus profonds.
Vous me direz que cette question vous semble peut-être abyssale. Comment faire dès aujourd’hui pour entamer ce chemin ? Eh bien encore une fois de façon assez contre-intuitive : en envisageant dès à présent votre mort. Rien de glauque ou de morbide ici. La conscience de la finitude de la vie apporte une lumière différente sur ce que nous voulons en faire. Nos sociétés craignent la mort, elles en rejettent souvent l’idée, cela reste un grand tabou. Cependant, les recherches montrent que la conscience de la mort nous permet de nous concentrer sur les bonnes priorités. Sur le sens que nous voulons donner à ce temps si précieux parce que rare. Cela nous aide même à faire preuve de plus de bienveillance avec les autres, d’avoir plus de compassion et de considérer davantage les grands enjeux qui nous dépassent comme les multiples défis sociaux et environnementaux.
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